Sélectionné en compétition officielle au dernier festival de Cannes, le film de Sergei Loznitsa, « deux procureurs » glace le spectateur par son implacable dureté envers celles et ceux qui refusent d’entrer dans le système de la corruption, et son inévitable corollaire, la criminalité. En 2017, il avait présenté « une Femme douce » à Cannes.
Nous sommes en URSS, en 1937, au plus fort de la répression
et des purges staliniennes, lesquelles affaibliront pour plusieurs années
l’armée rouge, puisque les plus hauts gradés finirent dans les goulags.
Un jeune procureur, tout droit sorti d’une école de la
magistrature, est envoyé quelque part visiter les détenus dans ces fameux
goulags. Il y rencontre un vieux communiste, torturé abominablement par les
nouveaux maîtres de la Russie, lesquels s’évertuent à éliminer les vieux
bolcheviques qui rêvent d’un pays où règnerait la démocratie, la liberté, où la
misère serait vaincue. Au sortir du goulag, il va droit vers le Procureur
général à Moscou, lui raconte les exactions des policiers (NKVD), lequel lui
fournit un laisser-passer. Piège évidemment, qui l’enverra directement lui
aussi au goulag, qu’Il ne découvrira que trop tard.
Dans ce film de deux heures qui n’offrent pas de surprises
tant on en devine la fin inéluctable, très linéaire dans son scénario comme si Loznitsa voulait démontrer
l’inéluctabilité du système, certaines séquences apparaissent totalement lunaires.
Il y a ce dédale invraisemblable au sein de cette prison afin de découvrir la
cellule de ce vieux bolchévique enfermé, malade, et dont on sait qu’il ne
sortira pas vivant. Multiples couloirs, une cour traversée, puis encore des
couloirs, un souterrain, toujours des couloirs, et des grilles cadenassées et
gardées par des policiers aux mines inquiétantes. Glaçant aussi l’image du
Procureur général au visage inexpressif, le buste de Staline au-dessus de lui.
Mais ce qui est le plus frappant, c’est ce vieux
bolchevique, présentant les nombreuses traces de tortures qu’on lui a
infligées, et qui croit encore en un Staline épris de justice, d’ailleurs comme
ce jeune procureur qui ne comprendra le piège qu’une fois arrivé devant la
porte de la prison, encadré par deux policiers qui n’auront cessé de se moquer
de lui.
Film sans femmes, à l’exception de celles attendant devant
la prison, aux regards terrorisés, on retiendra aussi cette scène dans le train
vers Moscou où le jeune procureur côtoie de vieux soviétiques, dont l’un, ayant
perdu un bras et une jambe lors de la 1ère guerre mondiale, raconte
s’en être allé trouver Lénine, et l’ayant rencontré quelques instants.
Au sortir de la salle, on se dit que les choses n’ont guère
changé dans la Russie de Poutine.

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