C’était au Théâtre de la Ville de Paris, salle Sarah-Bernhard, merveille architecturale après 7 années de rénovation, que Pascal Rambert présentait « Les Conséquences » après avoir créé sa pièce au CDN de Rennes, 1er volet d’une trilogie dont le dernier devrait voir le jour en 2029, si d’ici là, un gouvernement ne met pas fin au théâtre subventionné.
Toute la fine fleur du théâtre public était convoquée sur le
plateau, les habitués de l’auteur et metteur en scène, et quelques nouveaux,
depuis « « Rupture de l’amour »,
duel exceptionnel entre Stanislas Nordey
et Audrey Bonnet, repris au théâtre
de l’Atelier en 2024, « Répétition »
et bien d’autres créations depuis.
Il y a donc sur le plateau, outre les deux noms déjà cités, Arthur Nauzyciel, passé par le CDN
d’Orléans, aujourd’hui à Rennes qu’il quittera fin 2026, Anne Brochet, Laurent
Sauvage à Avignon l’été dernier dans un magnifique seul en scène musical, Jacques Weber dont les années pèsent,
et d’autres, nouvelles et nouveaux dans l’équipe Rambert.
Murs blancs des trois côtés, lumières qui peuvent être
aveuglantes au plafond, sorte de bloc opératoire chirurgical destiné sans doute
dans l’esprit de Rambert, à
autopsier la famille sur le plateau, car c’est bien de cela dont il s’agit. Il
y a Jacques, le père, sorte de pacha, psychiatre et député depuis la nuit des
temps, son épouse (Marilu Marini),
qui n’avait pas de corps explique-t-elle, avant de tomber amoureuse de Jacques,
lequel lui en a donné un, deux filles, Audrey et Anne, une troisième se trouve
en hôpital psy, elle lance des excréments sur tous ceux qui l’approchent, les
gendres officiels (Arthur et Stan), un amant (Laurent), enfin la troisième
génération avec un mariage féminin entre deux femmes enceintes toutes deux.
Deux heures quinze d’affrontements dans cette famille où
toutes et tous ont fréquenté les grandes écoles (ENA ou Ulm), à l’occasion
d’obsèques familiales ou de mariages sur une durée de plusieurs années, où l’on
vide son sac, où des secrets familiaux explosent à la face de l’autre, où les
amours extra-conjugaux se dévoilent au gré des applications sur téléphone
portable « craquées ». Quelques scènes d’anthologie parcourent le
spectacle, on citera celle où Arthur reproche à Anne le rendez-vous manqué,
performance monstrueuse d’Arthur Nauzyciel aussitôt applaudi, réaction rare
chez le public ; ainsi que la passe d’armes (celles-ci devraient
apparaître lors du prochain volet de la trilogie « Rambertine »)
entre Audrey et Stan, évidente poursuite du duel entamé dans « Rupture de
l’amour » pour le public qui connaîtrait la pièce.
In fine ou presque, Stan dira ses quatre vérités au père, « Vieillard, assis ! » lui hurle-t-il alors que Jacques tente de se lever (à ce moment précis, la salle retient son souffle à tel point que les tousseurs, fort nombreux, en restent cois), lui rappelant comment il a éduqué sa fille aînée aujourd’hui internée, secret de famille jeté à la face du pacha.
Texte bourré de références culturelles, que le spectateur
possède ou pas, Jacques se permettant même d’évoquer la mise en scène de la
Cerisaie de Tchekhov par Alain Françon en 2009. Deux heures quinze
passionnantes, et chaleureusement applaudies.


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