Le cinéaste iranien a frappé fort avec « un simple Accident » récompensé par la Palme d’Or à Cannes cette année. On n’avait d’ailleurs plus trop l’habitude des longs métrages politiques honorés par la Palme depuis pas mal d’années, il semblerait en effet que la direction du Festival demandait au Jury de décerner la récompense suprême à un film dit populaire. C’est l’exception cette année.
Un animal qu’on ne verra pas, écrasé par une automobile en
pleine nuit, une panne moteur, un arrêt dans un village, un homme qui se
propose de réparer sommairement, et tout va se détraquer dans cette micro
société iranienne quand le patron de l’atelier de mécanique pense reconnaître
celui qui l’a torturé abominablement quelques années auparavant. Il a tôt fait
de le retenir prisonnier dans son Van, d’aller chercher d’autres anciens
torturés comme lui, une photographe, une jeune femme sur le point de se marier,
et un troisième, Hamid. Est-ce lui, « l’éclopé » qui les torturait ?
On le reconnaît à la voix, au bruit de sa prothèse de jambe, au toucher de
l’autre jambe, à son odeur. Mais est-on certain ?
Jafar Panahi excelle dans sa filmographie, à partir d’un
incident mineur, à créer une succession de crises déstabilisant la micro
société au sein de laquelle il filme. Déjà dans son précédent film, « Aucun Ours » sorti en 2022, le
village qui l’accueille se retrouve en une quasi insurrection en raison d’une
photo que, lui Jafar, a prise ou n’a pas prise, on ne saura pas.
Donc, les voici en plein désert avec le moribond dans le
Van, en attendant Godot (c’est dans le
texte). Qu’en fait-on ? Peut-on user des mêmes méthodes de
violence ? Mais ce qui est fait est fait (encore dans le texte), et ne peut être défait, aurait dit Lady
Macbeth.
Jafar Panahi parsème son film de nombreuses doses d’humour
bien senties, aidé en cela par une panoplie de comédiens et comédiennes haut de
gamme, notamment la future mariée en robe blanche qui montre qu’au pays des Ayatollahs,
certaines femmes ont un caractère bien trempé et ne s’en laisseront pas compter
par le mari. Hamid n’est pas mal non plus dans son genre.
Panahi en profite pour dénoncer les actes de torture que la
police iranienne utilise contre celles et ceux qui osent défier le régime ;
au passage, il met en exergue des situations cocasses où la bureaucratie
iranienne bat des records d’absurdité.
Le final est plus dur, il fallait bien clore le film, on ne
pouvait pas attendre Godot indéfiniment. Je laisse le spectateur le découvrir.
Un grand film politique, sans doute bien plus politique que les précédents, le
passage en prison l’ayant sans doute radicalisé dans son combat pour la
liberté.
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