dimanche 28 mai 2023

La Plâtrière de Thomas Bernhard

« La Plâtrière », roman de Thomas Bernhard publié en allemand en 1970, en français en 1974, évoque le couple Konrad, elle paralysée,, tous deux âgés, reclus dans une immense demeure, sorte de prison, en forêt autrichienne.

Dès le début, on sait que l’homme a assassiné sa femme avec un fusil. Le roman, mis à part les 4 ou 5 premières pages, ne contient qu’un seul chapitre et un seul paragraphe. Néanmoins, il n’est en rien indigeste, au contraire !

Les 200 pages et un peu plus ne sont que les témoignages de Wieser et Fro, on n’en sait pas plus sur eux, qui racontent au narrateur (lui non plus, on ne sait qui il est, mis à part qu’il semble être agent d’assurances), ce que le meurtrier, Konrad, leur a dit de sa vie, et surtout des dernières années passées à la Plâtrière.

Son but à Konrad aura été d’écrire un « essai sur l’ouie » dont il ne rédigera pas la moindre ligne. On sait qu’il s’occupe de son épouse, qu’il lui lit du Kropotkine (qu’elle déteste) et du Ofterdingen qu’elle adore. Mais surtout qu’il utilise sa compagne afin de poursuivre ses expériences sur l’ouie par la méthode d’Urbantschitch (mystère !). Epouse esclave de son mari, mais aussi mari esclave de l’épouse.

Thomas Bernhard use de très nombreuses répétitions, chaque chose est répétée inlassablement jusqu’à plus soif, mais dans un style magnifique. Répétitions, mais aussi oppositions, contradictions. « L’infirmité de la femme était une folie, tout comme la folie du mari, une infirmité. » « Ainsi alternent les deux pensées, celle de pouvoir rédiger mon traité sur l’ouie parce que je suis à la Plâtrière, et celle de ne plus jamais pouvoir le faire parce que je suis à la Plâtrière. »

On sent l’influence de Kafka dans ce roman, peinture terrible de la société bourgeoise autrichienne en décomposition, celle qui ne s’est jamais affranchie du culte d’Hitler.

La Directrice du CDN d’Orléans, Séverine Chavrier, l’a adapté au théâtre sous le titre « Ils nous ont oubliés », passé à l’Odéon, au TNS de Strasbourg, au Portugal, bientôt au CDN d’Orléans, puis en tournée à Genève ou Villeurbanne. 

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