Avec Rodrigo Sorogoyen, on n’est jamais déçu. « El Reino » nous avait ébloui, Sorogoyen décryptait les fondements de la corruption politique. Avec « As Bestas » , il élève la barre encore un peu plus haut, on comprend difficilement pourquoi un tel film ne s’est retrouvé qu’en « Cannes Première ». En compétition officielle, il eut sans doute fait un malheur !
« As Bestas », c’est le conflit entre deux modes de vie, deux conceptions de l’avenir d’une vallée montagneuse, deux visions de l’avenir de la planète.
Un couple de français approchant la cinquantaine tombe follement amoureux d’une vallée en Galice et décide de s’installer dans un village où ne subsiste que des maisons abandonnées et en voie d’écroulement, ainsi que deux paysans espagnols et leur mère âgée, cette famille n’ayant connu que la misère. La cohabitation pourrait être possible, bien que le niveau d’instruction soit géant entre les uns et les autres, si une société de construction d’éoliennes ne venait pas proposer de racheter le tout, pour une poignée d’euros, et de rendre la vallée inhabitable, tant pour la vie pastorale que le tourisme. Les uns veulent faire revivre la vallée à moyen terme, les autres sont prêts à tout brader, voir la vallée de leur enfance défigurée et perdue à tout jamais, pour un peu de fric. Le couple français qui cultive des produits bio est poussé dehors. Partira ? Partira pas ?
Dans une seconde partie, la fille du couple français débarque (Marie Colomb) : si ses parents se sont aimés beaucoup toute leur vie, elle se retrouve totalement décalée dans un autre monde, celui de ces jeunes femmes qui ont un enfant sans amour pour le père, comme ça par hasard, et qui ignorent comment on peut vivre dans la nature hors les villes. L’affrontement mère/fille restera comme un très haut moment cinématographique.
Le couple français, c’est Denis Ménochet et Marina Foïs, tous deux exceptionnels. Ils eurent mérité grimper à l’olympe de Cannes ! N’oublions pas Alejandro de Pablo, le Directeur de la photographie, attaché aux basque de Sorogoyen, qui a su donner au film des couleurs ocre, celle de la forêt automnale. Un grand film franco-espagnol qui fait honneur au cinéma, quand un réalisateur et scénariste a quelque chose à dire, ce qui en Europe n’est plus trop franchement à la mode.
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