La Compagnie « Le grand Souk » dont Manouchka Récoché est la Directrice artistique, a réalisé un haut fait d’armes, en mettant en scène, « Le Ravissement d’Adèle », pièce écrite par Rémi De Vos en 2008. Sur le plateau, peut-être une trentaine d’actrices et acteurs si ce n’est plus, dont huit enfants, certains bien jeunes : des artistes professionnels d’Orléans, mais aussi des amis de la Compagnie, et quelques artistes amateurs figurants, sans doute participant aux animations théâtrales de la Compagnie.
« Le Ravissement d’Adèle », c’est d’abord un texte écrit par un auteur, connu pour son « Débrayage », joué très souvent en Avignon, et qui interpelle sur les rapports dans la société entre dominants et dominés. Son « Ravissement » est une pièce forte, évoquant les thèmes de la rumeur, de la délation, de l’accusation gratuite, du péquin lambda qui sait qui a commis le crime pour autant qu’il y en ait eu un, de la montée en puissance dans une communauté de la condamnation d’un des leurs sur les bases du bouche à oreille, du « tous pourris » visant les politiques. La liste est fort longue de tous ces discours qui engendrent le vote à l’extrême droite.
Donc, une ado de 16 ans a disparu, ses parents ont alerté la police. Arrive un inspecteur qui est chargé d’enquêter. Sur scène, quatre maisons ou appartements. De gauche à droite :
1) la famille dont l’ado a disparu, remplacée par la grand-mère paternelle, en grand froid avec sa bru qui n’est pas la mère de la disparue, et qui va enquêter ;
2) la boucherie, dont le boucher accuse la mairie d’employer son personnel à ne rien faire et de prélever indûment des impôts, il sera accusé par la rumeur ;
3) un couple dont le mari (Hugo Zermati) maltraite verbalement son épouse ;
4) l’institutrice et sa fille ado, toutes deux en conflit.
Manouchka Récoché a choisi d’utiliser à fond le rire, plaqué sur ce texte profondément politique au sens noble. Choix de mise en scène audacieux, respectable, et certainement le plus juste. Et chacun et chacune d’en rajouter des couches dans le comique de scène, dans les pitreries ; dans le genre, Hugo Zermati emporte la palme, avec Aimée Leballeur dans le rôle de l’instit, Philippe Polet dans celui du boucher, Frantz Herman en inspecteur de police qui tombe amoureux de l’instit, et bien sûr Manouchka en bouchère à l’accent marseillais.
Ajoutez Fred Ferrand à la création musicale et à l’accordéon, vous avez là un spectacle de deux heures bon poids, que certains ne verront que par son côté comique et c’est vrai qu’on en ressort heureux comme tout, mais qui est bien plus que cela, un spectacle qui dénonce la bêtise, l’ignorance, la rumeur, toutes celles et tous ceux qui se répandent aujourd’hui sur les réseaux sociaux afin de cracher leur venin. Mais avec Rémi De Vos, il fallait s’y attendre. Lui n’écrit pas pour ne rien dire !
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