« Jusqu’à quand ? », tel est le leitmotiv entendu dans « 78.2 : article du code de procédure pénal », présenté au théâtre de la Tête Noire à Saran avec le soutien du CDN d’Orléans. « Jusqu’à quand » les contrôles d’identité cesseront-ils d’engendrer des morts violentes ? On a tous en mémoire les noms de ceux qui ont été victimes de violences policières, de bavures comme il se dit, en France, aux Etats-Unis ou ailleurs.
Ils sont 4 sur le plateau dont Thom (excellent Thomas Badinot), lequel a reçu un jour un truc dans la tête. Il conserve des séquelles physiques, voire mentales, mais c’est lui qui tient le discours le plus intelligent, quelque peu philosophique par moments. Il sait qu’il était policier, mais n’a aucun souvenir de sa vie d’avant. On saura à la fin le pourquoi du comment. Il y a aussi un grand type (Laurent Evuort), baraqué, parfois à l’humour décalé. Et deux jeunes femmes, l’une policière (Juliette Navis) tout en retenue, et l’autre (Emilie Chertier) capable d’exploser sur la scène tant son mal être peut devenir violent. Quatre personnages donc, très différents les uns des autres, mais qui s’interrogent sur les relations entre flics et non flics.
Pour celles et ceux qui ne savent pas, l’article 78.2, entré en vigueur en mars 2019 (c’est tout récent) permet les contrôles d’identité vis-à-vis de toute personne à l'égard de laquelle existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner avoir commis ou tenté de commettre une infraction, ou se préparant à commettre un crime ou un délit. Comme on le voit, le moindre soupçon permet à un policier de demander ses papiers à tout citoyen.
Bryan Polach de la Compagnie Alaska implantée dans le Cher, a écrit le texte et en a assuré la mise en scène. Polach n’a pas pris de pincettes pour dénoncer les « bavures » de la police, on entend la liste lancinante des victimes, Adama Traoré est quasiment présent sur scène, on reconstitue la mort de George Floyd à Minneapolis, des émeutes et barricades surviennent sur le plateau. C’est fort, sans doute trop fort ! Peut-être un second degré eut été préférable, les hurlements d’Emilie sont-ils indispensables ? A tel point que les uns et les autres sont tantôt victimes, tantôt policiers, mélange des genres, mais les flics ne sont-ils pas aussi des citoyens ? Et tout citoyen ne peut-il devenir un jour policier ? Polach donne la parole aux uns et aux autres, chacun exprimant ses craintes, ses peurs, son mal-être.
« Jusqu’à quand ? ». Thom, à qui les flics demandent ce qu’il fait là, répond qu’il attend Godot. Façon pour Polach de penser que les contrôles au faciès ne sont pas près de cesser.
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