Lion d’Or à la dernière Mostra de Venise, « l’Evènement » est le film choc de cet automne. Tiré du roman éponyme et autobiographique d’Annie Ernaux, c’est l’histoire d’une jeune femme en propédeutique (année de préparation à l’entrée à l’Université et située après le bac, supprimée lors de la réforme de 1966) qui se retrouve enceinte. A l’époque, nous sommes au début des années 60, l’IVG est fermement réprimée par la loi, la prison attend les médecins qui la pratiquent, la loi Veil ne sera votée qu’en 1975. Avoir un bébé, c’est fatalement arrêter ses études, être montrée du doigt, être qualifiée du mot honteux de « fille-mère ». Pour Anne, cela est impossible, elle veut absolument poursuivre ses études de lettres, puis enseigner, et plus tard écrire. Alors, elle décide d’avorter clandestinement.
Autant prévenir, l’IVG pratiquée par une « avorteuse » chez elle, vous glace le sang. Mais la réalité de l’époque était celle-là ! Et ne surtout pas la cacher alors qu’aujourd’hui, nous assistons à une recrudescence de tentatives d’obstructions à l’IGV de la part de militants et d’associations d’extrême droite. Quant à celles et ceux dans le film qui n’ont rien fait pour aider Anne, il est difficile d’émettre une opinion : nous ne sommes plus dans le même contexte, qu’aurions-nous fait à leur place ?
Et comme le thème du scénario ne suffisait pas, le film révèle une actrice exceptionnelle, Anamaria Vartolomei, au regard bleu acier, d’une volonté farouche face au mur dressé devant elle, inondant l’écran, tantôt de toute sa fraîcheur, tantôt de toute sa douleur. La metteuse en scène, Audrey Diwan qui la filme souvent de dos, a eu assurément le nez fin en la choisissant pour ce rôle, certainement pas facile à interpréter. Diwan découpe son film en semaines, et l’on sait que plus les semaines s’écoulent, plus on se rapproche de l’impossible. La tension monte inexorablement jusqu’au choc, d’une violence inouïe.
On en vient à comparer le film que la Mostra a récompensé, un film de très grande valeur, alors que la Palme d’or de Cannes (que je n’ai pas vue, dieu m’en garde – façon de parler) montre l’héroïne faisant l’amour avec sa Cadillac. Le jour et la nuit. « l’Evènement » sera à n'en pas douter honoré aux prochains Césars.
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