lundi 19 juillet 2021

Retour d'Avignon

Après une semaine avignonnaise, totalement immergé au sein d’un des plus célèbres festivals, et 25 spectacles de théâtre, de danse et de concerts, quelques mots sur ceux qui m’ont profondément marqué.

Coté IN, « Lamenta » de deux chorégraphes et neuf danseurs et danseuses sur une musique grecque tout droit sortie des lamentations ancestrales accompagnant la mort d’un proche. C’est infiniment beau dans la nuit avignonnaise..

« La Cerisaie » de Tchekhov a fait couler beaucoup d’encre, déjà par la présence d’Isabelle Huppert. Beaucoup ont trouvé la mise en scène fade. Ce ne fut pas mon cas, je fus plutôt enthousiasmé par la prestation de l’ensemble des actrices et acteurs, lesquels possédaient une vraie épaisseur artistique, dans la mesure où il m’est apparu qu’il n’y a ni personnages principaux, ni secondaires, mais que toutes et tous assument un vrai rôle. C’est cela le génie de Tchekhov, et le metteur en scène, Tiago Rodrigues, futur Directeur du Festival en 2023, l’a très bien compris.

La Cerisaie dans la Cour d'Honneur

Enfin, « Une Femme en pièces » a créé l’évènement. Je connaissais le travail du metteur en scène, le hongrois Kornel Mundruczo, pour sa dernière pièce présentée au CDN d’Orléans, « Imitation of life », qui m’avait scotché par un théâtre hors normes chorégraphiant le chaos du monde. Ici, Mundruczo dissèque la famille, la mère, les deux filles, une cousine et deux gendres. Dans une première partie, une vidéo filmée en direct à l’intérieur d’un appartement sur scène, montre en gros plans, un accouchement d’une des deux filles, dans une grande douleur, des cris épouvantables amenant le drame. Six mois plus tard, chacun videra son sac comme on dit, avant que mère et filles se réconcilient en chansons. C’est assurément LE spectacle du festival, celui qu’il fallait avoir vu.

Côté OFF, les meilleurs parmi d’autres tout aussi bons.
« Histoire de la violence », d’après le texte autobiographique d’Edouard Louis, spectacle mêlant danse et théâtre. Un viol dans le monde homosexuel. Exceptionnel !
« Tumulte » entremêle danse contemporaine, chant lyrique baroque, guitares et violon, selon une chorégraphie de Bruno Pradet qui officie à Montpellier. Fabuleux !
« Artaud Passion » avec William Mesguish dans le rôle d’Artaud et quelques phrases magnifiques sur le théâtre.
« Sang négrier » ou l’histoire d’un capitaine qui se retrouve dans le port de Saint-Malo : des esclaves s’échappent du bateau, l’un d’entre eux ne sera pas retrouvé, sauf ses doigts qu’il cloue sur les portes des notabilités locales. Onze en tout. Terrible !
« Usure », danse hip-hop, mais pas que, que j’avais vu deux mois auparavant à l’Alliage d’Olivet. On ne s’en lasse pas.
« Pôvre vieille démocrasseuse » du poète canadien Sol, dit par l’exquise Marie Thomas. J’ai acheté le livre. Délicieux !
« De rocs et d’écume » de notre Compagnie Clin d’œil, sur des textes du poète Guillevic. Gérard Audax tient toujours la forme. Il faudra y retourner, le texte est fort.

J’aurais pu aussi évoquer « Premier amour » de Beckett, un excellent seul en scène de Jean-Quentin Châtelain, « Rêveurs d’aurores » duo de chanteuses dont Aimée de la Salle, la fille de Bruno, conteur que j’avais admiré en Avignon il y a près de 40 ans nous raconter les aventures de Shéhérazade durant une nuit entière (souvenirs), un « Ivanov » de Tchekhov totalement jouissif, « Mlle Julie » de Stringberg mis en scène par le CADO d’Orléans, ou « les Souffrances de Job » d’Hanoch Levin. Et d’autres.

Merveilleuse semaine. A l’année prochaine !

Ah, j’aurais pu oublier. Samedi après-midi, en me rendant au gymnase Aubanel où « une Femme en pièces » allait faire jaillir l’intelligence humaine, j’ai croisé une manifestation de l’extrême Droite vauclusienne, trouvant dans la guerre au vaccin et au passe sanitaire,  de quoi cracher sa haine. Triste ! 

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