Avec Vinterberg, on boit plus que de raison

Thomas Vinterberg est un cinéaste danois qui explore les familles, qui décortique la psychologie des personnages qu’il met en scène. Dans son dernier long métrage, « Drunk », « ivre » en anglais, sélectionné à Cannes en 2020, voici quatre hommes, profs dans le même lycée, lesquels au cours d’un repas au restaurant, s’interrogent sur une thèse d’un chercheur qui soutient que l’espèce humaine devrait être continuellement imprégné de 0,5 g par litre de sang. Elle s’en porterait alors beaucoup mieux. Les 4 (on a le choix pour les qualifier) décident alors de soumettre cette thèse à leur expérience.

Ces quatre ont la quarantaine, certains mariés avec enfants, mais le ménage va brinquebalant, d’autres célibataires et l’absence de famille commence à peser. Alors, on s’adonne à la boisson pour vivre mieux, pour être plus intéressant avec les élèves, pour renouer les liens distendus du couple. Au début, ça marche, mais la descente aux enfers sera brutale.

Vinterberg ne se pose pas en accusateur, il ne condamne pas, d’autant plus que les lycéens, dès l’obtention du bac, organisent une fête alcoolisée. « Dans ce pays, on picole », dit l’une des épouses. Le réalisateur connaît les défauts de son pays, il cerne la psychologie de ces 4 profs pour amener le spectateur à ne se poser ni en juge, ni en procureur, mais à essayer de comprendre pourquoi ces hommes bien insérés dans la société peuvent prendre la pente glissante de la boisson.

Quatre acteurs remarquables filmés de main de maître par une caméra qui va chercher les regards de ces quatre profs. La manière de filmer les beuveries est hallucinante à tel point que je me suis demandé si les acteurs n’étaient pas copieusement ivres pendant le tournage. Mads Mikkelsen, le prof d’histoire, celui sur lequel s’attarde la caméra, produit une interprétation haut de gamme de son personnage. La scène finale atteint un sommet dans la beauté cinématographique. (Oscar et César du meilleur film en langue étrangère 2021)