dimanche 23 août 2020

Rendez-vous new-yorkais pour questionnaire à choix multiples

Et dire que certains regrettent l’absence de très bons films sur les écrans français ! Se rendent-ils dans les salles obscures ? A moins qu’en dehors des blockbusters, considèrent-ils qu’il n’y a rien ? Si cela est, ils vont être ravis dans quelques jours.

La Berlinale en février dernier, quand la pandémie n’avait pas encore stoppé net le 7ème art, a attribué un Ours d’Argent, soit le Grand Prix du Jury, à une cinéaste indépendante américaine, Eliza Hittman, pour un film d’une rare profondeur, au titre à rallonge, « Never Rarely Sometimes Always ». Et ce n’est pas usurpé. Je noterai au passage que le Jury de Berlin me satisfait toujours dans ses choix, je n’ai jamais rien à redire, contrairement à celui de Cannes, souvent décrié dans son palmarès. Cherchez l’erreur ! Sans doute le premier cherche-t-il moins les paillettes, le buzz, le clinquant, que le second.

Automn a 17 ans, lycéenne, et caissière dans un supermarché à son temps libre avec sa cousine un peu plus âgée qu’elle. Elle est enceinte. Elle ne dira rien du père, mais on se doute que le beau-père, affalé dans un canapé devant la télé, pourrait bien être l’auteur du forfait. Avec sa cousine, elle part à New York pour avorter là où on peut encore aux USA, malgré une manif chantant le « Je vous salue Marie » à la porte du centre médical. Elle a bon dos, la Marie ! Avec leurs maigres économies, il faut payer le bus, puis le métro, l’hôpital. Alors, sans argent, on se débrouille comme on peut, et on ne mange pas.

Eliza Hittman nous place au cœur du parcours semé d’embûches de ces deux jeunes filles, sans détour, de manière assez crue, où Automn se retrouve à répondre à un questionnaire à choix multiples (d’où le titre du film) face à une infirmière pleine de compassion : sans doute le moment le plus fort du film, là où on perce quelque secret de famille inavouable. Eliza Hittman n’a rien à faire d’un éventuel drame, elle brosse froidement le portrait de ces deux jeunes femmes, ce pourrait en être beaucoup d’autres, dans une Amérique en proie aux vieux démons.

Sidney Flanigan dans le rôle d’Automn et Talia Ryder, la cousine, sont éblouissantes de sincérité, on devrait les revoir sans doute. Notons aussi la présence de la Directrice de la photographie, la française Hélène Louvart, qui avait officié lors du très beau « Heureux comme Lazzaro », et qui nous offre des portraits où transpercent les sentiments les plus profonds des jeunes filles : du très beau travail 

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