L’ATAO présentait en ce mercredi soir, à la salle Gérard-Philipe à la Source, l’adaptation du roman d’Annie Ernaux, « les Années », publié en 2008 et qui lui valut une succession de Prix, mais mineurs il faut néanmoins le préciser.
« Les Années », c’est un peu le film de la vie d’Ernaux par le prisme de photographies qu’elle a conservées, bien qu’elle utilise le pronom « elle » pour parler d’elle-même, mais le personnage pourrait être quelqu’un d’autre. Elle survole ainsi la période s’écoulant de 1941, sa naissance, à 2006 lorsqu’elle a clos son roman. C’est à la fois ses souvenirs d’écolière, d’adolescente, de jeune maman mariée, de mère divorcée, mis en parallèle avec la vie sociale et politique, les années d‘après l’occupation, la guerre d’Algérie, de Gaulle au pouvoir, puis mai 68 et ainsi de suite avec les années Mitterrand, les conquêtes des femmes notamment l’IVG, la pilule, et ce qu’on nomme le modernisme, la télé, le transistor, ainsi que le rappel de ce qu’était l’école autrefois où le silence des élèves était la règle, le tout entrecoupé de chansons d’époque… J’ai lu le roman récemment et une question m’a particulièrement taraudé : comment mettre en scène une telle œuvre littéraire ?
Jeanne Champagne, à la tête de la Compagnie « Théâtre Ecoute » s’est attelée à la tâche, s’arrêtant à l’année 1975, mais couvrant néanmoins une vaste zone historique, où la société française s’est transformée radicalement.
Un homme et une femme sur le plateau, racontent, chantent, dansent, évoquent les années passées. Elle, c’est Agathe Molière (nom prédestiné au théâtre, mais cela a dû être dit des centaines de fois), tourbillonnante, pleine de mimiques, genre adolescente, changeant prestement de tenue, l’écolière, la communiante, la femme mariée, mais toujours pleine de vitalité, sachant maintenir l’attention du public, on sent la comédienne surdouée. Lui, c’est Denis Léger-Milhau, plus en retenue, évoluant sur un registre différent de sa partenaire, mais la complétant fort bien.
Certes, on eut aimé que « les Années » se poursuivent, aillent jusqu’au bout (2006), mais le spectacle vivant a ses contraintes de durée. La conquête de l’IVG clôt le spectacle sur une note d’une particulière intensité émotive. Un tonnerre d’applaudissements a conclu ce spectacle d’une très haute qualité artistique. Sans doute, les lycéens présents dans la salle n’ont pu percevoir le spectacle comme un adulte né dans les années 40/50, mais chacun le reçoit selon son âge, son sexe, son passé, son histoire propre. C’est ce qui fait la magie du spectacle vivant !
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