Mais où donc nous emmène Kiyoshi Kurosawa dans son dernier long métrage, « Au bout du Monde « ? Concernant le lieu, on sait : il s’agit de l’ancienne République soviétique, aujourd’hui indépendante, l’Ouzbékistan. Ce qu’il faut savoir de ce pays, c’est que de 1991 à 2016, il est présidé par un dictateur qui réprime toute contestation, censure la presse indépendante, après avoir noyé dans le sang, les menées islamistes au début des années 2000, et probablement ordonné le massacre d’Andijan en mai 2005 faisant environ 1500 morts, massacrés à l’arme lourde par l’armée. Depuis 2016, un nouveau Président tente de démocratiser le pays, selon des observateurs.
C’est dans ce contexte qu’il est bon d’avoir à l’esprit, que se situe le film de Kurosawa. Une équipe de 5 japonais réalisent un reportage pour une émission de variétés, vantant les beautés touristiques de l’Ouzbékistan, reportage présenté par une jeune animatrice au physique d’adolescente, tout sourire lorsque la caméra tourne, et en proie à de profondes introspections sur son avenir. Le spectateur découvrira ainsi les beautés de Samarcande où les touristes affluaient au temps de l’URSS, de Tachkent la capitale, ainsi que de merveilleux paysages de montagne, sous un ciel d’une pureté absolue. On rencontre aussi la police, sous un côté affable, père de famille, bref des policiers comme on rêve d’en voir partout dans le monde. Quant à la jeune journaliste, elle s’égare la nuit en jupette bien courte, dans des endroits sombres, à priori mal famés, sans qu’elle ne soit importunée par quiconque. L’Ouzbékistan, le meilleur des mondes possibles, aurait pu dire Maître Pangloss. Alors qu’à Tokyo, une usine brûle dans le port, provoquant un désastre écologique vu à la télé ouzbèke. On a même une jolie métaphore : une adorable chèvre toute blanche est remise en liberté par la journaliste, symbolisant la liberté retrouvée du pays.
Alors, on se demande si Kurosawa n’a pas été payé par l’office de tourisme ouzbèk, pour nous vanter ses paysages, ses marchés aux mille couleurs dans les villes, et surtout la gentillesse de la police et des autorités. Afin de relancer le tourisme évidemment, disparu sous la dictature.
Ceci dit, l’actrice principale, Atsuko Maeda, qu’on a déjà vue dirigée par Kurosawa notamment dans « Avant que nous disparaissions », est formidable, en journaliste totalement décalée, d’autant qu’elle nous interprète à deux reprises, la chanson de Piaf, « l’Hymne à l’amour », en japonais s’il vous plaît. Un gros brin d’humour, il en fallait, telle la recherche d’un poisson géant dans un lac (non, on n’est pas en Ecosse), nous permet de tenir sans difficulté les deux heures. Mais Kurosawa est bien loin de son meilleur cinéma.
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