Parler de l’Europe est un exercice difficile. Laurent Gaudé
et Roland Auzet s’y essaient dans la Cour du Lycée Saint-Joseph, que le ciel a
bien voulu, peu après 22 heures en ce mardi 9 juillet, nous éviter la pluie qui
tomba par intermittence toute la journée. Le public est présent, on essuie sièges
et dossiers pour assister à ce spectacle de deux heures trente, « Nous, l’Europe,
banquet des peuples ».
Un panneau lumineux invite, semble-t-il, la jeunesse à
excuser l’insouciance de leurs aînés si le vieux continent est laissé aux
générations futures dans un état aussi désastreux. Ils sont une cinquantaine
sur le plateau, recouvert de matelas, à nous faire face. L’un d’eux, ironise
sur le OUI et le NON lors du référendum constitutionnel. Puis un cri lancinant,
terrible et long, déchire le lieu, c’est l’histoire de l’Europe passée en
revue, des insurrections de 1848 aux deux guerres et leurs abominations, le colonialisme
y sera dénoncé, on fête la destruction du Mur de Berlin, on condamne l’intervention
soviétique en Tchécoslovaquie, on interroge à maintes reprises un migrant venu peut-être
de Syrie, mais rien est sûr. Tout cela, on connaît évidemment.
Le problème, c’est que le duo Gaudé/Auzet ne livre pas d’analyse,
là où on aurait voulu qu’elle soit. On aurait pu s’interroger sur les raisons
qui amènent des millions de gens à idolâtrer tel dictateur, à se jeter sans
raison aucune dans une guerre et son cortège de désolations, à voter pour les
plus riches, les plus corrompus. On aurait pu mettre le doigt sur la démocratie
électorale, laquelle permet à ceux qui se réclament sans le dire, du fascisme,
d’être élus au Parlement européen. Comme si les électeurs ne connaissaient pas
le passé. Mais rien de tout cela ne nous fut livré.
Le pire fut atteint bien après minuit quand deux invités
surprise firent leur entrée sur le vaste plateau : deux technocrates au
service de Jacques Delors, alors Président de la Commission européenne, et à
qui on posa des questions d’une naïveté confondante. On se serait cru à la télé
dans un débat où on oppose des gens qui pensent la même chose. On était alors
bien loin du prologue quand on rappelait l’histoire du OUI qui balaya le NON.
Les divers chapitres sont entrecoupés par une musique rock
tonitruante et par l’intervention des chœurs de l’Opéra avignonnais.
Globalement, on ne s’ennuie guère, mais l’occasion de poser les vraies
questions a été bel et bien manquée. Il ne suffit pas de dénoncer, encore
faut-il analyser. Pourtant, on avait là un groupe d’acteurs/chanteurs qui
aurait pu se prêter à l’exercice. Dommage ! Quant au dérèglement climatique,
domaine où l’Europe devrait être à la pointe dans un combat essentiel pour la
survie de l’humanité, il n’en fut point question. Ah, au fait ! on s’interrogea longuement sur
l’hymne européen capable de fédérer les
peuples : ça nous a fait une belle jambe ! Mais cela a permis de
finir dans une grande chorale où le public applaudissait. Alleluia !
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