samedi 29 décembre 2018

Le goût du soju est inégalable en automne

Dès qu’un nouveau film du coréen Hong Sang-soo est programmé sur nos écrans, il faut s’y précipiter tant son cinéma recèle de beauté, d’intelligence, d’étonnements pour le spectateur. Son dernier, « Grass », est probablement un des plus étranges films qu’il m’ait été donné de voir, déjà par sa longueur peu usuelle, 66 mn en tout et pour tout, et projeté en Noir & Blanc.

Nous sommes dans un café, au fond d’une ruelle, dans un lieu improbable. On ne verra pas le cafetier dont on nous dit qu’il est sympa. Il y a là une jeune femme (l’inévitable Min-Hee Kim) devant un ordinateur portable. Elle écrit. Mais lorsqu’on l’interroge, elle reste évasive. On saura juste que ce n’est pas fait pour être publié. Chacun est libre d’interpréter, un peu comme dans « Burning » de Lee Chang-Dong. Heureux cinéma sud coréen ! Je donnerai donc ma version telle que le l’ai comprise.

Cette jeune femme imagine des rencontres se déroulant à côté d’elle ou ailleurs, entre une femme et un homme, plus tard entre une sœur et un frère, ce dernier aimant une jeune fille, puis encore une jeune femme et un homme plus âgé, puis quelques autres qui finiront par se retrouver dans le café, là où « lorsque le vent d’automne souffle, le goût du soju est inégalable ». C’est du moins ce qu’on nous dit. De quoi parlent-ils ? D’amours rompus, de suicide ou de tentative, d’ignorance de qui est l’autre… On disserte sur la vie qui passe, sur les espoirs déçus, la solitude pour un vieil acteur, d’écriture de scénarii, le tout sur un fond de musiques de Wagner, Schubert, Offenbach…

Hong Sang-soo filme les discussions, le plus souvent caméra sur le côté en plan séquence, allant de l’un à l’autre, rarement de trois-quarts arrière pour l’un et quasiment de face pour l’autre. Et puis, il y a cette scène qui se prolonge, d’une jeune femme montant un escalier et le redescendant de plus en plus vite, métaphorant l’impossibilité de revenir en arrière dans sa propre vie, chacun devant assumer ses choix passés, quitte à ce qu’ils furent des erreurs dramatiques. Mais au final, il faut regarder devant soi. C’est, me semble-t-il, le message du réalisateur sud-coréen.

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