Tout est dans le titre ! Voilà une question d’ordre existentiel. Quel avenir peut-on offrir à un enfant naissant en 2019 et dont l’espérance de vie, considérant les possibilités actuelles de la médecine, peut empiéter sur le 22ème siècle ? On connaît les dégâts provoqués par l’homme sur une planète qui, dans moins d’un siècle, aura épuisé toutes ses ressources fossiles, pétrole et uranium compris. Sans parler du réchauffement climatique qui sera loin de s’inverser à cette période : les experts prédisent une augmentation de la température qui ne pourra aller qu’en s’accélérant, des continents devenus des déserts, la montée des océans… C’est par cette question que « Séisme » interpelle les spectateurs.
Duncan MacMillan, dramaturge anglais, est un auteur contemporain, qui traite dans ses pièces des questions sociétales. A son actif, « Lungs » qui se traduit littéralement par « Poumons » a été créée aux Etats-Unis, en Allemagne avec Katie Mitchell, en Afrique du Sud, en Angleterre évidemment. En France, Séverine Magois en a assuré la traduction sous le titre « Séisme ». La Compagnie du Prisme, basée à Villeneuve d’Ascq, s’est emparée du texte et l’a présenté dans le OFF d’Avignon en 2017, dans une mise en scène d’Arnaud Anckaert. Lors d’un vaste tour de France, la Compagnie faisait escale au théâtre de la Tête Noire à Saran en ce jeudi soir.
Un mur blanc, devant un plateau blanc aussi. C’est tout le décor, mais avec un texte d’une grande beauté et d’une richesse insoupçonnée, point trop n’en faut. Deux acteurs forment un jeune couple et s’interrogent sur le bébé à concevoir. La discussion est franche, rude parfois. Elle travaille sur une thèse concernant l’écologie, lui est musicien. Au cours du spectacle d’une heure vingt, tous deux passeront en revue les grandes étapes de leur vie de couple, la grossesse, la fausse couche, la séparation, puis la réconciliation, les rapports avec leurs parents respectifs, une nouvelle grossesse, l’enfant qui grandit, enfin le troisième âge avec la lumière qui s’éteint lentement sur le plateau. Magnifique.
Lui, c’est Maxime Guyon, apparaissant souvent démuni face aux interrogations de sa compagne. Elle, c’est Shams El Karoui, laquelle se révèle être une formidable actrice, dans un rôle quasiment fait pour elle. Ici, la mise en scène est épurée, tout est dans le texte fait d’ellipses, qui capte les spectateurs tant l’homme et la femme semblent totalement investis dans leur débat intime de couple. Un grand texte, un formidable duo d’acteurs.
Un seul regret : le très faible public qui s’était déplacé pour entendre un texte d’une actualité brûlante. En écrivant cet article, je découvre la Une du journal Libération « Moins d’enfants pour sauver la planète » et en deuxième page : « Couche-culotte ou couche d’ozone, faut-il choisir ? ». Cela ne pouvait pas tomber mieux !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.