dimanche 11 novembre 2018

Conde parodique transalpin

Lors du Festival de Cannes 2014, Alice Rohrwacher est repartie avec le Grand Prix pour son long métrage « Les Merveilles ». Je n’avais pas été totalement convaincu par la récompense offerte par le jury présidé par Jane Campion. Le film s’articulait en deux parties : la première, magnifique, se déroulait dans une ferme transalpine où les paysans élevaient des abeilles, la seconde dérivant vers le féerique dans une île paradisiaque.

Cette année, Alice Rohrwacher est revenue à Cannes avec « Heureux comme Lazzaro » pour lequel le Prix du Scénario lui a été attribué par Cate Blanchett. J’avoue ne pas avoir été plus convaincu cette fois-ci. Le problème, c’est qu’il semble bien que la réalisatrice italienne peine à se renouveler, son Lazzaro s’avérant être construit sur le modèle du précédent, en deux parties, la première réaliste, la seconde déviant vers la parabole.

Nous sommes quelque part en Italie, coupés du monde ou quasiment. Une famille noble, le Marquis et la Marquise règnent sur un village de pauvres gens surendettés, exploités jusqu’à la corde dans la culture du tabac. Un couple de jeunes voudrait bien fuir, mais la Marquise oppose son veto. On comprendra pourquoi. Ces pauvres paysans ne connaissent rien d’autre que leur sort, et ne revendiquent donc rien. Parmi eux vit Lazzaro, jeune homme au visage d’un ange, un peu simplet, lui-même esclave des paysans. On lui fait tout faire. La moindre tâche lui est dévolue sans la moindre protestation de sa part. Voilà pour la partie réaliste, d’une grande beauté. On sentirait presque la patte de Visconti.

En seconde partie, Lazzaro se réveille en plein champ, puis arrive en ville et retrouve quelques membres de sa famille ainsi que le fils du Marquis avec qui il s’était lié d’amitié. Mais si Lazzaro est toujours le même, les autres ont vieilli de plusieurs dizaines d’années. Voyage dans le temps ! Après la misère des campagnes, voilà la misère des villes puisque sa famille réside dans une sorte de bout du monde, chacun vivant d’expédients, d’escroqueries en tous genres. In fine, il braque une banque avec un lance pierres et se fait massacrer par des gens un peu moins pauvres que lui, venus quémander un crédit.

Alice Rohrwacher nous explique donc qu’un pauvre trouvera toujours plus pauvre que lui et l’exploitera jusqu’à la corde, tout en bénissant ceux qui possèdent. Ce n’est peut être pas faux, mais le conte parodique de Rohrwacher est un peu lourd. Quant à Lazzaro (Adriano Tardolo) à la figure d’ange et qui ne se plaint jamais, c’est qui ? le Christ ?

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