mardi 2 octobre 2018

Où l'on veut exorciser l'homosexualité

Un film provenant de ce que nous nommons l’Afrique noire est toujours un évènement. Avec « Rafiki » de la réalisatrice Wanuri Kahiu, nous plongeons au Kenya, qui n’est pas le pays le plus pauvre, ni le plus conservateur du point de vue sociétal. Il s’agit du premier film kenyan présenté à Cannes dans la section « un Certain Regard ».

Il traite de l’homosexualité féminine, sujet des plus sensibles un peu partout dans le monde, et tout particulièrement en Afrique, pays musulmans ou catholiques confondus. Au Kenya, la loi interdit de s’aimer entre deux personnes du même sexe. Le film a donc été interdit, avant que la justice n’en autorise la projection pendant une seule semaine afin qu’il puisse concourir aux Oscars US. Premier succès, mais bien fragile. D’ailleurs, la réalisatrice avoue avoir dû vaincre bien des réticences de la part des acteurs/actrices, de l’équipe technique, jusqu’au sein de sa propre famille. Courage à elle !

Kena, au seuil de l’âge adulte, fine silhouette, portant casquette aux couleurs chaudes, jouant au foot avec les garçons, vit chez sa mère. Son père a quitté le foyer et vit avec une jeune femme enceinte, ce qui a le don d’exaspérer l’ancienne épouse. Il mène une campagne électorale sans grands moyens financiers ni militants. Kena tombe subitement amoureuse de Ziki, aux formes plantureuses. Mais le père de Ziki se présente aussi aux élections, avec de l’argent et des militants. Les chances entre les deux candidats ne sont pas égales. On devine qui l’emportera.

Kena et Ziki se cacheront à peine pour s’aimer, la caméra ne laissant entrevoir que de fins baisers sur la bouche, quelques caresses sur les bras, histoire de ne pas effaroucher les autorités kenyanes. Mais la réaction du bon peuple sera destructrice, jusqu’à la leçon d’exorcisme menée par le prêtre de la paroisse, aux propos d’un autre âge.

D’un point de vue cinématographique, on devine les faibles moyens à la disposition de la réalisatrice. Quelques plans larges de la ville, pas de mouvements de foule, un même quartier, les mêmes quelques personnages, sur un scénario assez convenu… Et une formidable actrice, Samantha Mugatsia, celle qui tient le rôle de Kena, au sourire de rêve, qui exercera en hôpital des années après, médecin ou infirmière, on ne sait trop. Et le film se termine sur une note d’espoir… au grand dam de la commission de censure, mais final voulu par la réalisatrice qui considère que l’Afrique a besoin d’espoir. On est bien d’accord avec elle.

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