samedi 24 mars 2018

Une magistrale revisite de Tchékhov

©Pascale_Fournier
Tchekhov est à la mode, avec raison ! Ses « Trois sœurs » aussi. Elles étaient récemment à l’affiche de l’Odéon, totalement revisitées de manière radicale par l’australien Simon Stone, et auparavant par le russe Kouliabine empruntant la langue des signes.

Julie Deliquet est à l’origine du collectif « In Vitro », lequel met en scène collectivement des textes afin que « l’acteur et le personnage, le texte et l’improvisation tendent à se rassembler pour ne faire qu’un. »

Le CDN d’Orléans présentait « Mélancolie(s) » du collectif In Vitro, texte écrit à partir de deux pièces du dramaturge russe, « Les trois Sœurs » et « Ivanov ». On retrouve dans Mélancolie(s) tous les ingrédients des deux pièces de Tchekhov, mais il n’est nul besoin de les connaître pour apprécier la création d’In Vitro.

La pièce se divise en trois chapitres.
1)    Nous sommes en été, deux sœurs et un frère fêtent l’anniversaire de la cadette ainsi que la mort du père un an auparavant. L’aînée, Olympe, est médecin, célibataire, la quarantaine. La cadette, Sacha, est mariée, un peu excentrique. Le frère, André, promis à un emploi d’ambassadeur, courtise une jeune femme, très olé-olé. Survient Nicolas, un ancien ami moscovite, sa femme Anna et son associé. Ils sont donc huit. On se souvient, on rit, on boit, on lance des vannes, on se moque, on philosophe telles les cigognes. Mais déjà, on sent à de menus détails que le climat s’alourdit. Les reproches fusent, la blague antisémite aussi.
2)    Quelques années plus tard, c’est Noël. Les huit sont à nouveau réunis. L’épouse de Nicolas est atteinte d’un mal dont on ne nous dit rien, mais la mort est prochaine. On accuse Nicolas d’en être à l’origine : il ne l’aime plus, la délaisse. La jeune olé olé a eu un enfant, lequel est malade. Son père André n’a pas eu d’ambassade, dépense tout son argent au jeu, ignore la maladie de son fils. L’associé de Nicolas boit plus que de raison et sème la discorde. Nicolas et Sacha, la sœur cadette, tombent amoureux.
3)    Quelque temps plus tard, l’épouse de Nicolas étant morte, celui-ci se remarie vite fait, bien fait, avec la sœur cadette, pour la rejeter immédiatement, atteint de mélancolie, persuadée qu’elle court à sa perte en restant avec lui.  In fine, un coup de révolver retentit.
©Simon_Gosselin
Tchekhov est là, avec ses personnages de la vie réelle, ses dialogues qui recèlent le fond de l’âme des différents protagonistes. On assiste à une lente dégradation des relations humaines jusqu’au drame final. Le personnage de Nicolas apparaît comme le pivot de la pièce : tout se rapporte à sa personne, sa femme mourante, son associé noceur, le couple de la sœur cadette qu’il détruit… Mais la mélancolie atteint aussi Olympe qui ne sait plus que faire de ses quarante ans, André qui boit… Exceptionnelle performance d’Eric Charon dans le rôle de Nicolas, lequel travaille au sein du collectif In Vitro depuis le début, en 2009. Avec Julie Deliquet, In Vitro a de beaux jours devant lui !

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