« Bangkok Nites », du cinéaste nippon Katsuya Tomita, est une formidable fresque de la Thaïlande, des bordels thaïs où les riches japonais viennent faire leur marché comme chacun se rend à l’épicerie du coin, à la région de l’Isan, au nord-est du pays, avec une incursion au Laos voisin.
Le film d’une durée de 3 heures, mais cela passe relativement vite, se subdivise en 3 parties. La première montre ces hôtels où les filles venues de la campagne, alignées sur une estrade, grands sourires, vantent leurs charmes aux Japonais appâtés dès la descente de l’avion. Parmi elles, Luck, considérée comme la n°1 du groupe, se fait pas mal d’argent afin de faire vivre sa famille restée dans un village de l’Isan, la grand-mère, la mère cloîtrée dans une maison et totalement droguée, sœurs, frères, cousins, cousines, toutes et tous, fruits de la prostitution.
Lors de la seconde partie, de mon point de vue, la plus intéressante, Luck nous emmène dans son village à la rencontre de sa famille. Les images sont splendides, je retiens notamment cette procession lors d’une fête, qui se reflète à l’envers dans un canal. Mais le sommet du film, c’est incontestablement le détour par le Laos de l’ami de Luck, et la découverte, au sein de la région des pêchers en fleurs, de dizaines de cratères créés par les bombes US au temps de la guerre en Indochine, la chanson en rap thaï interprétée par deux jeunes expliquant que dans quelque temps, les pêchers en fleurs seront remplacés par la jungle.
Enfin, la dernière partie, de retour à Bangkok, un peu confuse, n’apporte plus grand-chose au film.
Katsuya Tomita, et c’est ce qui donne sa grandeur au film, alterne les scènes où les légendes thaï sont psalmodiées, et où l’histoire récente de la guerre menée par les puissances impérialistes (Japon, France, Etats-Unis) est très étroitement mêlée à la fiction. On n’en finirait pas de détailler les scènes où apparaissent de curieux personnages, ceux qui pensent ressusciter la guérilla, les occidentaux errant dans le pays tel ce Français alcoolique et tout aussi drogué, les bonzes apportant leur bénédiction aux passants… Katsuya Tomita ne manque pas de filmer en arrière plan les temples bouddhistes d’une beauté prodigieuse, ou Bangkok et ses lumières, la nuit, ainsi que les fameux taxis montés sur moto.
Un voyage fabuleux de trois heures à travers la Thaïlande d’hier et d’aujourd’hui, où l’on parle thaï, japonais, un peu anglais et français, ainsi que la langue de l’Isan !
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