Le « Teatro Niño Proletario » créé en 2005 à Santiago du Chili, est en France pour quelques jours. Il présentait au CDN d’Orléans, « El Otro » dans une mise en scène de son Directeur, Luis Guenel, deux soirs à la salle Vitez, entre plusieurs représentations au Festival d’Automne dans la région parisienne. Et pour un choc, c’est est un !
La Compagnie chilienne a choisi d’entrer dans l’univers de la psychiatrie. Là-bas, elle a visité un hôpital. Intrigué par la présence de miroirs dans les couloirs, les médecins leur ont expliqué que les malades n’ont pas conscience que l’image qu’ils ont devant eux soit la leur, et se prennent à aimer leur double. Ce que les médecins ne savent expliquer.
A partir d’un texte illustré de nombreuses photos, « l’Infarctus de l’âme », Luis Guenel a imaginé un spectacle sur « l’autre », celui qui est différent, qui n’entre pas dans la norme, ou physique, ou mentale, ou sexuelle… Ici, nous sommes parmi les handicapés mentaux. Ils sont 7 sur le plateau, de tous âges, l’un d’entre eux est de petite taille et difforme. Ce qui s’y passe ne se raconte pas, ne peut se raconter. Il s’agit de rêves et d’amours, tels que Guenel les a découverts dans l’hôpital qu’il a visité, et comme face au miroir, ils/elles organisent des jeux par deux, jeux qui peuvent donner le frisson aux spectateurs.
Persuadé durant le spectacle, qu’il s’agissait de véritables handicapés, je me suis retrouvé dans un état d’appréhension, guettant l’irruption venant des coulisses, du metteur en scène afin de parer à tout dérapage. Aux saluts, et plus encore lors du débat qui a suivi, j’ai compris qu’il s’agissait d’acteurs professionnels, dont la moitié parlent un Français quasi parfait.
Le théâtre de Luis Guenel est politique tant il parle d’humanité, tant il met à nu les différences, en les jetant à la figure de nous autres spectateurs. Certains ont préféré aller voir, dans la salle à côté, « Vingt-mille lieues sous les mers », mis en scène par la Comédie Française. Au moins, ceux-là ne se posent pas de questions, ils en prennent plein les yeux. Et c’est tout. Mais ils ne veulent surtout pas penser !
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