Robin Campillo est un cinéaste qui prend son temps. Dès les années 80, quand le Sida commençait ses ravages, il envisageait déjà un film sur le sujet. Il viendra 30 ans plus tard, avec « 120 battements par minute », présenté cette année au Festival de Cannes, et reparti, selon le Jury avec le Grand Prix, et selon les festivaliers avec une Palme du cœur.
Il était projeté ce vendredi en grande avant-première aux Carmes, à Orléans, en présence du réalisateur, et deux salles pleines. Il sortira sur les écrans français le 23 août, en juillet en Avignon.
Campillo entremêle trois composantes : les militants d’Act’Up en Assemblée Générale (RH, réunions hebdomadaires, comme ils disent), les opérations coups de poing destinées à secouer la société et particulièrement les décideurs, Pouvoirs publics et laboratoires, enfin des scènes d’amours homosexuelles, parfois séparées par ce que Campillo nomme des métamorphoses, à savoir de courtes séquences d’images de synthèse (sont-ce les virus qui viennent s’attaquer aux cellules ?), lesquelles permettent au spectateur de décompresser, de reprendre son souffle, et nous dira le réalisateur, de nous interroger sur ce qui va suivre.
Parmi les acteurs, l’une est très connue : Adèle Haenel, très active en AG, et surtout lors des opérations coup de poing ; fidèle à son habitude, l’air tranchant, l’œil sévère, elle entraîne le groupe ; on sent qu’elle a dû ressentir un plaisir immense à tourner, comme tous d’ailleurs. Mais surtout, un jeune argentin, Nahuel Perez Biscayart, un peu efféminé, voire androgyne, au minois adorable, écrase tout par son énorme présence : c’est probablement Cleews Vellay, Président d’Act’up entre 92 et 94. Son passage à l’hôpital (à l’ancien CHR d’Orléans), puis son retour chez sa mère, ses copains qui passent le voir, ses dernières jouissances sexuelles, son ami qui veille sur lui lors de la nuit funeste, la main qui vient constater la mort, tout cela a quelque chose de pathétique, mais aussi empreint d’une solennité dans le passage vers l’au-delà. Hymne à la mort, terrible quand on est jeune ! mais aussi formidable combat pour la vie, espoir chez cette mère qui vient de perdre son fils, digne dans la souffrance. Spectateurs, préparez vos mouchoirs !
Campillo a vécu ces années-là avec Act’Up, il a coécrit le scénario du film avec Philippe Mangeot qui fut Président d’Act’Up Paris à la fin des années 90. Ils savent par conséquent de quoi ils parlent dans leur long métrage (quand même 2 heures 20 qui passent finalement relativement vite). Un film d’une brûlante actualité, une piqûre de rappel pour les jeunes qui n’ont pas connu les années terribles, et une beauté cinématographique exceptionnelle.
Très beau film, poignant qui retrace un combat toujours d'actualité . Ce film m'a bien rappelé mes premières années de fac à St Denis dans les années 1988-90 où des groupes se retrouvaient dans des amphis mis à disposition par l'université, pour la cause..Le combat continue avec les vivants.
RépondreSupprimerJe pense aussi aux amis partis trop trop ... et à ceux qui sont bien vivants et endurent cette maladie.
Ce film est pour moi un hymne à la vie pour lequel jusqu'au bout chaque minute doit être vécue pleinement !