vendredi 21 juillet 2017

Genet, la lutte des classes et les damnés de la terre

Lorsque Jean Genet écrit « les Bonnes » en 1947, la France se souvient des sœurs Papin et beaucoup tirent un parallèle entre cette affaire (le meurtre des patronnes par les domestiques) et la pièce de Genet. Pourtant, Genet réfute toute correspondance, laquelle n’est d’ailleurs pas évidente.

Katie Mitchell, artiste britannique, transpose la pièce (De Meiden, titre officiel en Avignon) aux Pays-Bas, la patronne est en fait un homme travesti, entretenu par un « bricoleur » comme le nomment les deux domestiques polonaises, Claire et Solange (prénoms gardés de la pièce de Genet). Ces deux-là rêvent de trucider leur patron(ne) qu’on appelle toujours Madame. Alors l’une se déguise en Madame avec perruque, corset, maquillage, robe d’apparat et j’en passe, pendant que l’autre l’insulte, la bat et finit par lui mettre le couteau sous la gorge. Jeu qu’on devine particulièrement malsain ! Madame étant de retour, on tente de lui faire boire une camomille empoisonnée, mais en vain.

Madame partie passer la nuit avec son bricoleur, et craignant leur retour, les deux Bonnes se livrent à nouveau à leur jeu dramatique : cette fois, Claire exige de sa sœur qu’elle lui tende le bol de camomille et s’empoisonne volontairement, devant l’échec de leur tentative de meurtre sur Madame. C’est le geste désespéré devant leur échec à toutes deux, peut-être aussi pour prouver à sa sœur qu’elle est la plus courageuse et peut-être aussi lancer un défi à la bourgeoisie.

Car dans cette pièce, on est en pleine lutte de classes. D’ailleurs, en mourant, Claire rêve à tous ceux qui vont suivre son corbillard, tous les sans grade, les « sans dents », les damnés de la terre en quelque sorte. Mitchell a d’ailleurs accentué ce caractère en situant les deux bonnes parmi la population immigrée, celle qui a encore moins de droits.

Le caractère dramatique de la pièce augmente petit à petit tout au long des 100 minutes, Mitchell parvenant à glisser quelques éléments de mise en scène tels les ralentis comme au cinéma.

Ceci dit, étant placé en fond de salle, la lecture des sous-titres en bleu pour le polonais n’était pas simple, ceux en néerlandais, les plus nombreux, plus lisibles ; quant à la vision de ce qui se passait sur scène, je n’en parle pas, les acteurs/actrices étant plutôt de simples silhouettes. Et c’est fort dommage !

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