dimanche 1 mai 2016

La révolution égyptienne vue par un paysan

Anna Roussillon est née à Beyrouth, a grandi en Égypte et a effectué en France ses études de littérature. Diplômée d'arabe, elle l'enseigne à Lyon, travaille dans la traduction de textes littéraires et sur divers projets en rapport avec l'Égypte. Autant dire qu’elle entretient avec ce pays, des liens particuliers.

Elle rencontre Farraj, un paysan de la vallée de Louxor en 2009, se lie d’amitié avec lui et sa famille, ses voisins, et entreprend un film pour raconter leur vie. Ainsi est né « Je suis le peuple ». En janvier 2011 a lieu la rupture, celle de la place Tarhir, la démission forcée de Moubarak, les élections portant à la présidence un « frère musulman », puis de nouvelles manifestations conclues par le retour de l’armée et le Maréchal Al Sissi à la tête du pays. La « révolution » égyptienne et les évènements de la place Tarhir, Farraj et les habitants du village, ne les verront qu’à la télé, objet incontournable dans la vie des paysans et de leurs enfants. Mais on en parle le soir, au retour des champs, notamment lors de l’élection présidentielle de 2012. Il faut néanmoins préciser que, la télé n’en parlant pas, les divers massacres qui ont jalonné ces quelques années révolutionnaires en Égypte, le film n’en parle pas, et pour cause : ils sont ignorés, là-bas, dans le village.

C’est cet enchevêtrement que filme Anna Roussillon, les travaux des champs, la vie dans la maison, dans la rue, la recherche de bouteilles de gaz d’une part, et les évènements vus à la télé, les discussions entre hommes, les réflexions des enfants, et les débats entre Farraj et elle-même derrière la caméra. Où l’on découvre un paysan, sans grande éducation, mais ô combien intelligent, faisant preuve de réflexion politique, et qui, bien qu’ayant voté Morsi en 2012, saura évoluer et participer aux manifs en 2013 dans sa vallée, aujourd’hui dépourvue de touristes.

Documentaire exceptionnel qui prend fin sur une coupure d’électricité durant le discours du Maréchal à la télé, annonçant la chute de Morsi, prélude d’une dictature militaire de fer. Qu’en est-il aujourd’hui des espoirs de démocratie (le mot revient très fréquemment dans la bouche des uns et des autres), et de la vie dans cette zone rurale où les parents aspirent à une vie meilleure pour leurs enfants ?

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