Le cinéma d'auteur, on en raffole !

Les Malheurs de Sophie, roman de la Comtesse de Ségur, est passé de mode. Quels parents oseraient offrir un tel livre à son enfant ? Quoique dans certain milieu…
C’est pourtant ce roman que Christophe Honoré a choisi de porter à l’écran. Entreprise risquée certes ! Il lui fallait contourner la difficulté et éviter le piège du film rasoir qui donne envie de sortir au bout de dix minutes. Honoré a choisi le conte raconté  aux grandes personnes, et ça fonctionne terriblement bien. Il a recours à l’animation pour représenter tantôt un écureuil, tantôt des hérissons. Quant au naufrage du navire sur lequel s’était embarquée la famille de Réan, une peinture s’anime soudainement, c’est tout simplement beau !

L’équipe du film est merveilleuse.
Côté adultes, il y a d’abord la maman, superbe Golshifteh Farahani, l’actrice de Syngué Sabour, dont on devine la lente descente dans la maladie, et dont chaque apparition au cinéma est un ravissement. Puis, la voisine, Anaïs Demoustier, la maman des petites filles modèles, les deux rousses dans le film, qui respire la fraîcheur de parents ouverts à une éducation moderne. Enfin, Muriel Robin, qui n’apparaît que tardivement dans le film, et qui est une vraie caricature de femme acariâtre, dotée de tous les défauts, et championne dans la vieille éducation réac des enfants, à coups de martinet.
Côté enfants, ils sont cinq. D’abord Sophie, à savoir Caroline Grant, exceptionnelle d’espièglerie, comédienne née. Elle ira loin si elle persévère dans la comédie. Et les quatre autres, tous aussi adorables. On se dit que durant le tournage, on a bien dû s’amuser follement.

Pour finir, un spectacle chanté et dansé sous la pluie par les enfants (les Chansons d’amour ne sont pas loin), et un générique surprenant à ne pas rater. Reste la question qui consiste à savoir si c’est un film pour enfants. Il suffit sans doute de demander leur avis à la sortie de la salle. Simplement, les jeunes enfants doivent avoir une grille de lecture différente des adultes, sinon, pas sûr que ça fonctionne. Mais un film pour adultes, ah oui, assurément, et qui fait honneur au cinéma français d’auteur. Et je suis persuadé que Sophie Rostopchine eut été ravie de voir son roman le plus célèbre porté ainsi à l’écran.