Le cinéma palestinien, ça existe ! Je viens de voir le film « Dégradé » réalisé par les frères Tarzan et Arab Nasser. Certes, la France a apporté son aide, du côté de la photographie et de la production. Mais réaliser un long métrage, même tourné en Jordanie, quand on est né à Gaza, et qu’on raconte la vie dans cette enclave coupée de tout, tient plutôt de la gageure. Voilà ce qu’en dit d’eux les Inrocks : « Quand ils apparaissent, l’air de la pièce change : deux grands Demis Roussos babas cool dandys grunge, pilosité abondante, yeux cernés de khôl, bijoux partout, pantalons écossais, boots de hipsters… Ils dégagent un charisme de ouf. On les croirait sortis d’une communauté hippie de San Francisco ou Katmandou alors qu’ils sont nés et ont grandi à… Gaza ! On vous présente les jumeaux Arab et Tarzan Nasser – Arab a le visage un peu plus rond et broussailleux, Tarzan porte la barbe un peu mieux taillée et les ongles vernis en noir. »
Le film se déroule en huis clos, dans un salon de coiffure pour femmes, à Gaza même. Le seul moyen de communiquer avec l’extérieur est le téléphone portable, sorte de premier compagnon pour toutes ces femmes.
Il y a là deux coiffeuses, et des clientes, celle qui est sur le point d’accoucher, celle qui reste dans le salon avec son hijab et qui prie à l’heure dite, celle qui va se marier et qui veut être la plus belle (avec un joli dégradé !), celle qui a une langue de vipère, et ainsi de suite… Au début, l’humour est délivré par petites touches ; mais la tension va monter crescendo, quand l’électricité est coupée, puis quand le groupe électrogène cesse de fonctionner, que le rideau métallique est descendu, et que l’enfer est dans la rue. Tout ça en raison d’un lion que tient en laisse le copain de la coiffeuse, et que le Hamas veut récupérer.
Curieusement, ce sont les groupes militaires qui règnent sur Gaza qui sont pointés du doigt, Israël étant à peine évoqué, ou de manière subliminale. C’est la vie à Gaza, celle de tous les jours, qu’ont donc voulu montrer les frères Nasser. Où l’on découvre des femmes, qui s’adaptent tant bien que mal à cette vie dans l’enfer de Gaza, et qui malgré tout, veulent aussi vivre leur vie de femme comme partout ailleurs.
Une fiction qui a valeur de documentaire, projetée lors de la Semaine de la Critique à Cannes en 2015, ce qui était déjà un évènement en soi, et saluée comme il se doit.
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