mercredi 25 mai 2016

Au théâtre, on peut encore parler politique !

« Je suis Fassbinder », texte de Falk Richter, est donné au théâtre de la Colline, en ce mois de mai. La mise en scène est de l’auteur et de Stanislas Nordey. Ce dernier, Directeur du TNS de Strasbourg où il a créé la pièce, est aussi sur scène accompagné de son compère Laurent Sauvage, de Thomas Gonzalez, de Judith Henry et d’Éloïse Mignon, cette dernière étant franco-australienne et travaillant depuis deux ans sur les pièces de Richter.

Rainer Werner Fassbinder, naît en 1945 et grandit en Allemagne de l’Ouest, dans ce pays en reconstruction et non débarrassé de sa période nazie. Il devient cinéaste, écrivain, journaliste, acteur, metteur en scène. Il crée des personnages, ni bons, ni mauvais, mais dans la réalité allemande, ce qui lui vaut des haines durables. Il aura tourné 40 films pour la télévision et le cinéma, aura reçu un Ours d’or au festival de Berlin. Il meurt à l’âge de 37 ans dans des circonstances troubles.

Des tapis blancs moquettés parsèment la scène, trois écrans sur lesquels sont projetés, soit les acteurs eux-mêmes, soit des extraits de films de Fassbinder.

C’est un texte choc qu’a écrit Richter, tombé à l’âge de 17 ans en admiration devant le travail de Fassbinder, qu’il n’a plus quitté. Texte de lui-même, ou emprunté à ceux de Fassbinder, c’est selon.
Il aborde les thèmes politiques actuels qui se posent autant en Allemagne qu’en France : l’arrivée des réfugiés lors d’un face à face entre Laurent et Stan qui pourrait être celui entre Fassbinder et sa mère, l’Europe décrite dans un poème magnifique, l’amour, le sexe, la violence, la montée du fascisme, le féminisme, la démocratie, l’état d’urgence (en France aujourd’hui, en Allemagne dans les années 70), l’homophobie…

Texte écrit début 2016 après les viols à Cologne, mais étonnamment actuel avec le « Tout va s’arranger » d’Éloïse faisant écho au « Ça va mieux » de qui vous savez.

Laurent Sauvage et Stanislas Nordey, que je considère tous deux comme un des meilleurs duos d’acteurs actuels en France (à ce titre, les Molière ne connaissent pas, et c’est mieux ainsi tant cette cérémonie est désuète et stupide !), apparaissent monstrueux sur scène. In fine, Nordey livre un monologue de très haute tenue, intellectuelle et théâtrale. Du théâtre politique comme on n’en trouve plus. Le public a rappelé plusieurs fois, on en ressort heureux.

« La démocratie, c’est tout de même la forme d’état la plus humaine, oui ou non ?
« Le mieux, ce serait une sorte de dirigeant autoritaire qui serait tout à fait bon et gentil, qui serait quelqu’un de bien. » Fassbinder, 1977

Ça ne vous rappelle rien aujourd’hui ?

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