En Iran, du moins sous le règne de la République islamiste, comme si ces deux mots pouvaient s’accorder, les femmes n’ont pas le droit de chanter en soliste devant un parterre composé d’hommes. Soit le public doit être exclusivement féminin, soit le groupe vocal doit être mixte, former un chœur, à condition encore de ne pas se toucher, et bien sûr de porter le hidjab.
C’est afin de dénoncer cette situation que Sara Najafi a tenté d’organiser un concert à Téhéran, avec uniquement des chanteuses, quelques instrumentistes hommes (pour contourner l’interdiction) et un public mixte. Son frère, Ayat, a réalisé ce documentaire, « No Land’s Song », entre 2011 et 2013, narrant les diverses péripéties qui ont jalonné ces deux à trois années au cours desquelles, les espoirs ont succédé aux déprimes et réciproquement.
Sara Najafi, elle-même compositrice musicale, a fait appel à deux chanteuses françaises, Jeanne Cherhal et Élise Caron, une tunisienne Emel Mathlouthi, et quelques chanteuses iraniennes. Dès le début du film, nous savons que le concert a eu lieu, mais seulement après l’élection du « modéré » Rohani à la Présidence de la République, et parce que les autorités ont jugé que le retour des françaises dans leur pays sans avoir pu chanter, aurait un impact négatif. Ici, on regrettera que la partie française, confondant Iran et Syrie (la remarque moqueuse d’un iranien vaut son pesant d’or), ait semblé la moins encline à forcer le cours des choses, et plus prête à jeter l’éponge que la partie iranienne.
Le moment sans doute le plus fort, hormis le concert à la toute fin du documentaire, c’est l’interview d’un mollah, devant la caméra, expliquant : « la voix chantée de la femme se transforme pour donner du plaisir, et aucun homme décent ne devrait ressentir d’excitation sexuelle » affirme-t-il, devant le visage médusé de Sara.
Magnifique documentaire, même si les conditions du tournage n’offrent pas une qualité d’images exceptionnelle, qui montre que rien ne peut empêcher la roue progressiste de tourner dans le bon sens, et pourtant, au Ministère de la culture et de la guidance islamiste (oui, ça existe), Sara s’était entendu dire : « Oubliez, c’est impossible ! ». Le concert a donc bien eu lieu, avec des voix et une musique fabuleuses, et surtout des textes, bien loin de nos mièvreries occidentales, dénonçant l’obscurantisme et appelant la liberté sous les cieux iraniens.
PS : Les Hidjab portés par le groupe des chanteuses, de couleurs vives, rouge vif pour Sara, parfois très en arrière telle la chanteuse tunisienne, ne cachaient rien de la beauté féminine. A la sortie du cinéma, je suis monté dans le tram et me suis assis à la seule place vacante, aux côtés d’une jeune femme, tout de noir vêtue, portant un hidjab noir, jusqu’à la limite des sourcils. Je me suis demandé à ce moment, si la France avait des leçons à donner à l’Iran.
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