dimanche 17 janvier 2016

Une oeuvre d'art impressionniste

Carol, présenté en compétition officielle au dernier Festival de Cannes, est une œuvre d’art. Nous sommes aux Etats-Unis, en 1952. Le sénateur McCarthy fait régner sa loi, liberticide, contre tous ceux qui développent des idées progressistes, accusés de sympathies communistes, notamment parmi les intellectuels, ainsi que contre les homosexuels. Une brève réplique au début du film nous rappelle l’existence à cette époque de la commission des activités anti-américaines. Nombre de réalisateurs et scénaristes d’Hollywood en payèrent le prix. Chaplin lui-même s’exila en Suisse cette année-là. Voilà pour l’ambiance !

Carol est une femme de la bonne bourgeoisie, mariée, une fille de 5/6 ans. Son mariage va à vau-l’eau. Elle est lesbienne, au grand dam de son mari. Peu avant Noël, elle rencontre dans un magasin, Thérèse, jeune vendeuse, le visage poupon, alors en couple hétéro.
Entre les deux femmes, c’est plus ou moins le coup de foudre. Thérèse découvre alors son homosexualité, difficile à avouer dans l’Amérique de l’époque (quoiqu’aujourd’hui encore…).
Chacune abandonne son foyer pour vivre une sorte de road-movie de quelques jours d’hôtels en motels. Mais le mari de Carol veille au grain, aidé en cela par les hommes de loi !

Le début du film est déjà à lui seul, d’une grande poésie artistique. La caméra filme les pieds des passants, puis s’élève au niveau des visages, et continue à s’élever pour offrir un plan large au dessous d’elle, dans une rue quelque peu sombre, c’est le soir. Le réalisateur, Todd Haynes, nous offre des images splendides, filmant au travers des vitres, en réflexion d’un miroir, par l’entrebâillement d’une porte ou d’une cabine de douche. Sans doute peut-on qualifier son film d’impressionniste tant la beauté des images berce le spectateur.

Tout ici est d’une infinie précision : ont été particulièrement travaillés, les costumes, coiffures de l’époque, on y retrouve les grosses voitures américaines, la vieille machine à écrire, le vieux magnétophone à bande… Et surtout, Todd Haynes nous replonge à une époque où l’homosexualité était considérée comme une maladie mentale : à ce sujet, lors d’un repas familial, l’insistance des convives à convaincre Carol que le psychothérapeute est un médecin, ce que Carol réfute vivement, est tout à fait symptomatique d’une croyance, malheureusement encore partagée aujourd’hui.

Rooney Mara (Thérèse dans le film) a obtenu le Prix d’interprétation féminine à Cannes. C’est probablement mérité, mais on aurait aimé qu’elle soit associée avec Cate Blanchett (Carol), quoiqu’un prix récompensant l’ensemble du film aurait été plus judicieux !

1 commentaire:

  1. Je me suis accordée cette séance cet après midi, quel superbe film ... Quelles beautés que ces deux actrices et quelles belles interprétations pour chacune d'elles. Pourquoi aller contre nature et cacher ses penchants ... J'ai apprécié la fin du film ou chacune assume son choix.

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