mercredi 27 janvier 2016

L'Enfer selon Tarantino

Le générique d’ouverture nous le dit : « Les huit salopards » constitue le 8ème film de Tarantino. Deux fois 8 : est-ce voulu ? et comme Tarantino a dit et redit qu’il en ferait 10 en tout, faites le calcul pour savoir ce qui reste à venir…

Toujours est-il que les 8 salopards, c’est du Tarantino pur jus. Pour qui a vu son précédent, « Django unchained », autre western, les ressemblances sont frappantes : humour, flots d’hémoglobine à foison, peu ou pas de survivants à la fin, longueur du film, paysages de rêve, contenu fort du discours.

Parabole du Jugement dernier. Dès la première image, apparaît le visage du Christ, puis la caméra ouvrant un plan large, le Christ est là, recouvert de neige, crucifié. Il semble bien qu’il nous désigne du doigt, l’Enfer, que Dante nous racontait ainsi :

Parmi cet amas repoussant et sinistre
couraient des gens nus et pleins d'épouvante,
sans espoir de refuge ou d'héliotrope :
les mains liées derrière le dos par des serpents
qui leur dardaient aux reins leurs queues
et leurs têtes, et se nouaient par-devant.
Soudain sur un damné qui était près de nous
un serpent se jeta, qui le transperça
à l'endroit où le cou se rattache à l'épaule.
En moins de temps qu'on écrit O ou I
il s'alluma, et il brûla,
puis il tomba tout entier en cendres ;
et quand il fut à terre ainsi détruit,
la poussière se rassembla d'elle-même
et recomposa la forme précédente.

L’histoire se déroule peu après la guerre de sécession, de laquelle Tarantino extrait deux personnages, un vieux général sudiste et un major nordiste et noir, qui sont bien loin de s’être comportés honorablement durant les hostilités. Le réalisateur déroule son discours : l’homme n’est ni tout bon, ni tout mauvais, chacun a sa part de lâcheté, de cruauté pour peu que les circonstances lui permettent de les exprimer ; mais chacun possède aussi sa part de bonté, d’affectivité.

Pour le reste, le scénario est assez simple. Nous sommes au Wyoming, dans des paysages enneigés absolument fabuleux. Un chasseur de primes ramène dans une diligence, une femme destinée à être pendue pour crimes. En chemin, il récupère un autre chasseur de primes, et un soit disant shérif. Le blizzard soufflant, la diligence fait halte dans une auberge où la tenancière a disparu. A la place, cinq hommes occupent les lieux. Il y a du traquenard dans l’air.

Certes, si le film dure 2 heures 48, l’humour est omniprésent, même dans les moments les plus sanglants. La première moitié peut sembler longuette, mais le discours n’a rien du bla-bla. Et quand les choses se dégradent, les deux chasseurs de primes raisonnent comme de fins limiers de la police. C’est terriblement bien filmé, Tarantino d’ailleurs se fait plaisir en détaillant la cavalcade des chevaux tirant la diligence dans la neige.

Honte à moi, j’avoue être allé le voir en version française, n’ayant pas le courage de lire et voulant rester concentré sur les paysages et les « gueules » des acteurs. Car celles-ci valent leur pesant d’or, ce serait trop long de les énumérer, citons seulement Jennifer Jason Leigh, laquelle a eu le visage copieusement arrosé de liquide rouge en tout genre, et pas qu’une fois (si la scène a été répétée pendant le tournage, ça a dû être quelque chose), ainsi que Kurt Russel et Samuel Jackson, tous deux terrifiants, et cependant dégageant une vraie chaleur humaine.

Allez, au prochain, le 9ème. Peut-être Tarantino nous parlera-t-il des 9 muses, qui sait ?…

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