mercredi 9 décembre 2015

Amours interdits

Marguerite et Julien, de Valérie Donzelli, était en compétition officielle à Cannes, et a été « dézingué » par une grande partie de la critique cinématographique. A tort selon moi !

Ce film est adapté d’un « fait divers », appelons-le ainsi, tout au début du 17ème siècle, en Normandie, au sein d’une famille de la bonne noblesse. Un frère et une sœur vivent un amour enfantin. Lui, à l’aube de l’adolescence, est envoyé faire ses études à travers l’Europe, elle restant au château. Au retour du frère, après de longues années, l’amour enfantin, intact, se transforme en amour, d’où naîtra un enfant. Tous deux seront décapités en place publique en 1603, après le refus d’un recours en grâce du « bon » roi Henri IV.

C’est du moins le scénario du film écrit pour Truffaut en 1973, par Jean Gruault, décédé en juin de cette année à l’âge de 91 ans, proche des cinéastes de la nouvelle vague (Rivette, Godard, Resnais et Truffaut donc) et auquel le film rend hommage. Ce dernier ne sera jamais réalisé à l’époque, Donzelli en reprenant le scénario.

Sujet scabreux s’il en est ! Valérie Donzelli se garde bien de dire où est la morale, religieuse à l’époque, valeur universelle aujourd’hui qui interdit l’inceste, entre autres pour des raisons génétiques. Elle nous présente deux êtres qui s’aiment d’un amour indestructible, à chacun d’en penser ce qu’il veut, semble nous dire la réalisatrice.

Valérie Donzelli est une chercheuse en art cinématographique. Elle n’hésite pas à provoquer le spectateur, sans doute est-ce cela qui a déplu ! On se promène de siècle en siècle, cheval, calèche, automobile, et même hélicoptère faisant bon ménage. On a droit aussi à des temps suspendus, à des effets spéciaux fort réussis d’ailleurs quand Marguerite, évanouie, rêve à son frère la prenant dans ses bras. Et comme si ça ne suffisait pas, l’histoire est racontée à des enfants, une nuit, tous éveillés dans un immense dortoir comme on en connaissait autrefois, et qui semblent en connaître un rayon sur le sexe.

Ceci dit, il y a des scènes magnifiques, celle de la poursuite à cheval, le frère sauvant la sœur dont le cheval s’est emballé, ou celle du repas réunissant les deux familles avant mariage (un vrai tableau pictural). Alors certes, le tout manque sans doute de profondeur, on eut aimé moins de scènes d’action et plus de réflexion sur les sentiments des uns et des autres, sur le désir amoureux. Mais je persiste en disant que le film est néanmoins de bonne tenue.

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