Sublime Trintignant

Été violent, de Valerio Zurlini, tourné en 1959, en noir et blanc, était présenté aux Carmes, dans une salle bondée, en 35 mm.
Chef d’œuvre de l’art cinématographique !
Nous sommes en 1943, l’armée Canadienne remonte du sud pour libérer l’Italie du fascisme.
Dans une petite ville bourgeoise, en bord de mer, un groupe de jeunes gens désoeuvrés, issus de famille aisées, passent le temps comme ils peuvent. Carlo s’éprend d’une femme veuve, trente ans, sur laquelle la mère, tout droit sortie d’un roman du 19ème, veille strictement.

Le film est truffé de scènes marquantes : le slow sur un solo de clarinette ; le père de Carlo, dignitaire fasciste, prêt à en découdre ; l’avion volant en rase-mottes au dessus de la plage plongeant les baigneurs dans la terreur ; l’assaut donné par les anti-fascistes au local fasciste et mettant à terre le buste de Mussolini… Ce qui fait immanquablement penser au roman de Silone, « Une poignée de mûres »…

Mais surtout l’interprétation des deux acteurs principaux, Jean-Louis Trintignant dans le rôle de Carlo, et Eleonora Rossi Drago dans celui de Roberta, marque les esprits. Elle qui s’émancipe de la tutelle de sa mère à 30 ans (enfin !) en découvrant l’amour fou, tiraillé entre les bonnes convenances de son milieu et la volonté de refaire sa vie avec un homme plus jeune, qu’elle accompagne dans le train jusqu’à Bologne. Lui, dont le père est un responsable fasciste, et qui, alors jeune adulte aisé, sans souci, bénéficiant d’un report d’incorporation, n’a aucune idée politique puisque, dit-il, il « suit le troupeau », refusant par là toute idée de contestation de l’ordre établi.
Ils sont jeunes, beaux, s’aiment, et Zurlini sait les mettre en valeur.

Enfin, le film se termine sur le mitraillage d’un train qui les conduit à Bologne. Moment d’un réalisme terrible, qui m’a fait songer au cinéma d’Eisenstein.
Zurlini, réalisateur peu connu, était un géant à une époque malheureusement révolue où le cinéma italien produisait des chefs d'oeuvre !