vendredi 7 novembre 2014

Gertrud

Gertrud, texte écrit en 1906 par le suédois Söderberg, mis en scène par Jean-Pierre Baro, est présenté dans le cadre du Centre Dramatique National d’Orléans en ce début novembre.
En 1964, Dreyer porte la pièce au cinéma, film que je n’ai pas encore pu voir, malheureusement !
J-P Baro a donc décidé de remonter ce texte sur les planches après l’avoir découvert et en avoir été ébloui. Effectivement, le texte est d’une richesse infinie en traitant d’un sujet vieux comme le monde, à savoir l’amour.
J’avais pu assister, une semaine auparavant, à une répétition d’une bonne heure, puisque les acteurs étaient en résidence au Carré St-Vincent. A cette occasion, J-P Baro avait expliqué que la mise en scène était élaborée en équipe, chacun pouvant apporter ses idées au fur et à mesure de sa construction.
Sur scène, un mur au fond, couleur grise, deux portes coulissantes sur la droite. Au milieu de la scène, un piano. Le mur, sur roulettes, peut avancer, laissant le piano derrière lui, ce qui, conjugué à un éclairage astucieux et la présence d’un lustre descendant des cintres, crée une pièce pouvant s’apparenter à une scène de concert avec un public imaginaire derrière.

Gertrud apparaît sur scène, c’est une soprano, elle chante un air de Puccini (en fait en play-back, la Callas prêtant sa voix). Mais qui est-elle ?
Une femme, entre deux âges. Elle a aimé trois fois, d’un amour fou, trois célébrités mondaines. D’abord, un écrivain, puis s’est marié à un homme politique qui va bientôt devenir ministre, enfin un pianiste. Mais à chaque fois, elle se sentira délaissée, les mondanités prenant le pas sur l’amour. Cécile Coustillac est fabuleuse en femme amoureuse, délaissée, trompée, le rire facile, prompte aux pleurs aussi, refusant de devenir l’objet qu’on lui propose d’être, une femme libre tout simplement. Assurément, une immense actrice qui ne quitte pratiquement pas le plateau durant deux heures quinze.
Le premier, Gabriel interprété avec beaucoup de profondeur par Jacques Allaire, revient après des années supplier Gertrud de lui dire pourquoi elle l’a quitté, et de lui proposer, en vain, de reprendre vie commune. Le second, Gustav (Tonin Palazzotto, peut-être trop jeune pour tenir le rôle, on a du mal à y croire), avec qui elle est mariée et dont on apprendra qu’ils ont perdu leur enfant (est-ce la raison pour laquelle ils ne font plus l’amour depuis plusieurs mois ?), et qui va bientôt devenir Secrétaire d’État à la défense : c’est l’occasion pour Söderberg de dire ce qu’il pense du système politique. Le dernier, Erland (Elios Noël, acteur flamboyant), tantôt cherchant l’acte sexuel, tantôt rejetant froidement Gertrud.
In fine, Gertrud se réfugiera dans la solitude, l’amour fou ayant ses limites.

Deux techniciens, qu’on verra sur scène à plusieurs reprises pour changer le décor, nettoient le mur vers le milieu de la pièce, à grands coups de balai, faisant apparaître un miroir, puisque « le spectateur, lorsqu’il vient au théâtre, cherche à se regarder dans un miroir », nous a dit Jean-Pierre Baro.
Assurément, du très grand théâtre, autant par le texte, par la mise en scène et par le jeu des acteurs.

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