Le Quai à Angers |
De passage au Quai à Angers, occupé par le CDN dont le Directeur n’est autre que Thomas Jolly, jeune metteur en scène plein d’avenir et capable de présenter une tétralogie de Shakespeare d’une durée de 24 heures (oui, oui, j’en parlerai peut-être un jour), me voilà installé pour la pièce d’Anne-Cécile Vandalem, « Kingdom », que je n’ai pas pu voir cet été en Avignon pour cause de pluie (eh oui, il arrive qu’il pleuve en plein été là-bas !).
Quelques mots sur le lieu : inauguré en 2007, il fait face à la forteresse médiévale, séparés tous deux par le fleuve royal. Magnifique emplacement, deux salles de 900 et 400 places, un restaurant au dernier étage où l’on peut manger ou boire sur la terrasse (quand il ne fait pas trop froid), un bar au rez-de-chaussée qui propose une petite restauration d’avant spectacle, enfin une grande salle moderne aux fauteuils formidablement confortables et espacés qui permettent aux grands d’être à l’aise avec leurs jambes. Heureux Thomas Jolly nommé à Angers en janvier 2020, avec ce superbe instrument de travail.
« Kingdom », c’est une famille (3 générations, dont 4 enfants sur le plateau, ainsi que deux chiens) qui quitte la France et ses HLM pour émigrer au fin fond de la Sibérie, en pleine forêt. Tout irait pour le mieux, mais les cousins les imitent et s’installent à côté. Les ennuis vont alors commencer, on construira une clôture de laquelle on interdira aux enfants de regarder par-dessus. Des fois que…
Les problèmes surviennent, un chien meurt (empoisonné ?), un des trois fils disparaît (pour quelle raison ?), on raconte des histoires affreuses (sont-elles vraies ou sorties de l’imagination des adultes ?), des braconniers rôdent, mais sont-ils réels, des hélicoptères vrombissent dans le ciel (existent-ils vraiment ou sont-ils seulement craint par ces adultes ?) On évacuera les enfants avant que l’un des fils ne hurle sa peur de l’autre.
Le texte ne répond pas à ces questions, le spectateur est laissé libre d’interpréter, il ne possède que la version de cette famille, il ne peut donc savoir si toutes les craintes sont fondées ou non. Pour moi, il s’agit d’une famille que l’on classerait chez nous, dans une secte utopiste d'obédience d'extrême-droite, qui a fui parce qu’elle ne peut vivre avec l’autre quel qu’il soit, et qui imagine les cousins venus les rejoindre comme la cause des maux qui les assaillent. Seule la fuite peut leur offrir un sentiment de liberté impossible à trouver.
Le plateau toujours sombre illustre l’impossibilité de trouver un paradis, un royaume, pour cette famille, les acteurs et actrices étant filmées en continu, la vidéo projetée sur grand écran au-dessus d’eux. Spectacle bien rôdé depuis Avignon, une troupe de comédiens belges au mieux de leur forme, et une mise en scène parfaitement bien orchestrée par Anne-Cécile Vandalem, que j’avais déjà appréciée dans « Arctique » à Berthier. Mais ce dernier spectacle, « Arctique » m’avait semblé bien plus fort que « Kingdom », qui ne m’a pas provoqué l’émotion que j’avais ressentie dans « Arctique », peut-être parce qu’ici, la fuite est sans issue.
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