Juho Kuosmanen m’avait impressionné quand en 2016, il avait obtenu le Prix Un Certain Regard avec son film « Olli Maki » consacré à un boxeur finlandais qui avait disputé un championnat du monde en 1962. Le jeune cinéaste finnois avait reconstitué à la perfection un combat disputé dans un stade plein à Helsinki.
Cette année, revenu à Cannes, cette fois-ci en compétition officielle, il rafle le Grand Prix avec « Compartiment 6 », et ce n’est que justice tant Kuosmanen nous offre un film d’une stupéfiante beauté, sur fond d’une amitié vraie. Laura, étudiante finlandaise en archéologie, prend le train à Moscou pour Mourmansk, tout au nord sur la Baltique afin de voir de ses propres yeux les pétroglyphes, dessins gravés sur des pierres et datant de la préhistoire. Elle se retrouve dans un compartiment avec un homme, Vadim, qui se rend aussi à Mourmansk pour travailler dans une mine. Si au départ, les relations sont extrêmement tendues, ces deux êtres vont petit à petit apprendre à se connaître, s’estimer mutuellement et une amitié forte les unira tous deux jusqu’au bord de la Baltique, dans une tempête de neige.
Les trains en Russie étant ce qu’ils étaient (on doit être dans les années 80 ou 90 au vu de la caméra que possède la jeune femme), les arrêts dans les gares pouvant durer plusieurs heures, voire une journée, le voyage s’éternise dans la neige, nous sommes en hiver. On assiste à une lente, mais réelle transformation des sentiments qui unissent ces deux êtres, de la peur chez la femme à une amitié profonde qui s’arrêtera là pour une raison que je laisse découvrir. C’est remarquablement bien filmé, caméra à l’épaule dans l’étroit compartiment du train.
Kuosmanen peint une société russe formée de petites gens accueillants, telle la mère de Vadim, femme oh combien généreuse, ou ces gens pauvres qui offrent quelques bouteilles à Laura lors d’une étape. Kuosmanen a réuni autour de lui une bonne équipe d’acteurs, et surtout un duo russo/finnois tout à fait remarquable, un excellent Directeur de la photographie, dans un film parsemé de chansons très connues, le générique de fin se déroulant avec « Voyage, voyage » du groupe Desireless. Ce cinéaste est assurément le digne héritier d’Aki Kaurismäki.
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