samedi 17 octobre 2020

Jusqu'au bout de l'Usure du danseur, mais pas du spectateur...


L’Alliage
est une nouvelle salle de spectacles à Olivet, d’une jauge d’environ 300 personnes, nettement moins en cette période de distanciation sociale, mais techniquement fort bien agencée et très fonctionnelle. La programmation propose quelques belles pépites tant théâtrales que chorégraphiques, à ne pas manquer, Ce vendredi, nous était proposée « Usure », mélange de Hip-Hop et de contemporain, pièce pour 7 danseurs, 5 garçons et 2 filles. Le moins que l’on puisse dire est qu’on en a eu pour notre argent, on est bien loin des faiblesses parfois présentées par telle structure publique !

La Compagnie Zahrbat, installée à Roubaix, a été créée par Brahim Bouchelaghem, son chorégraphe et Directeur artistique, dont le solo éponyme dansé en 2004 donnera son nom à la compagnie. Brahim Bouchelaghem travaille régulièrement avec Mourad Merzouki, l’actuel Directeur du CCN de Créteil / Val de Marne, et Kader Attou, au CCN de la Rochelle, deux monuments de la danse Hip-Hop en France. « Usure », pièce créée en 2018, fêtait son second anniversaire en ce mois d’octobre à Olivet. Autant dire que les 7 danseurs, après des mois d’inactivité, respiraient un bonheur absolu sur cette nouvelle scène dédiée aux spectacles vivants.

En fond de plateau, une curieuse structure verticale, virant du rouge au blanc en fonction des lumières, attire l’œil du spectateur autant que les danseurs. Je me suis longuement interrogé sur sa représentation : paysage lunaire fait de montagnes déchiquetées ? Les danseurs, jean bleu et tee-shirt clair, accompagnés par une musique électro permettant la transe et signée Nicolas de Zorzi, se produisent sur des gestes répétitifs, occupant la totalité du plateau. Tantôt un, puis deux, puis trois, s’échappent du groupe pour un solo rompant l’unité chorégraphique. Vers le milieu de la pièce, une sorte de miroir horizontal descend des cintres, produisant une lumière intense en dessous : là, un danseur est pris de soubresauts, de déhanchements, sorte de désintégration du corps… Exercice d’une grande difficulté et remarquablement interprété.

Devant un tel spectacle, le spectateur est libre, soit d’admirer la chorégraphie, soit d’essayer d’en trouver une interprétation autre que celle donnée par la Compagnie, à savoir l’usure du danseur…. J’ai alors imaginé que la structure en fond de scène représentait les portes de l’Enfer tel que Dante l’a décrit, et que les 7 danseurs étaient une figure d’Orphée tentant de retrouver sa bien-aimée Eurydice. Interprétation toute personnelle, j’avoue.

Durant plus d’une heure, la Compagnie nous a offert un récital dansé, jusqu’à plus soif, au bout de l' « Usure » des danseurs. Ovation d’un public conquis, mais aussi très connaisseur en danse contemporaine, remerciés par les danseurs venu saluer individuellement en effectuant chacun une jolie pirouette. Pour un premier spectacle de danse, l’Alliage a mis le curseur très haut. On en redemande !

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