lundi 18 février 2019

Une allégorie pleine d'humour

Judith Davis, enfant, a vécu dans l’entourage de Bernard Sobel puisque ses parents étaient très proches du metteur en scène communiste. On ne peut alors s’étonner que le monde capitaliste lui sorte par les yeux. Après avoir créé sa propre compagnie, « l’Avantage du doute », en 2008, elle met en scène à la Bastille (faudra que j’y mette les pieds un de ces jours), la pièce qu’elle crée avec son équipe, « Tout ce qu’il me reste de la Révolution ». Aujourd’hui, elle la porte sur le grand écran. Et pour un premier long métrage, il s’agit d’un coup de maître, une merveille du cinéma.

Angèle est urbaniste. Elle se fait virer de sa boîte par des gens de gauche. Sa réaction est terrible, fulgurante, c’est déjà là un grand moment de cinéma. Et ce n’est pas fini. Tout au long du film, la réalisatrice (elle-même tenant le rôle d’Angèle) le parsème de scènes exceptionnelles : la danse de l’instit sur le rondeau des Sauvages de Rameau, le pétage de plomb du beau-frère, sorte de DRH particulièrement vorace, sa copine qui imite un employé de Pôle Emploi… On sent qu’on a affaire à une équipe de professionnels du théâtre qui savent jouer la comédie à la perfection.

Judith Davis, par une jolie allégorie pleine d’humour, tord le cou à la société de consommation, elle-même enfant du système capitaliste. Mais elle sait imbriquer l’ensemble dans une affaire familiale : parents anciens maoïstes de mai 68, mère ayant claqué la porte du domicile conjugal et qu’on retrouvera faisant les marchés, quelque part en montagne, habitant dans un endroit où le calme de la nature le dispute à la beauté du paysage, là où le monde des affaires financières n’a pas encore établi ses quartiers, ni d’ailleurs la pollution des villes. Tandis que le père d’Angèle, chez qui celle-ci échoit lorsqu’elle se retrouve au chômage, est resté dans son étroit appartement, entre Paris et la banlieue, tout près du périf, là où réside le monde ouvrier.

C’est donc plein d’humour, on rit devant les gags, que Judith Davis préfère à la morosité ambiante. Et son équipe avec laquelle elle travaille depuis plus de 10 ans, est magnifique de drôleries, d’impertinence. Ajoutons une magnifique bande son, parfois aux airs russes, et nous avons là un OVNI cinématographique de toute beauté.

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