jeudi 16 août 2018

Les petites gens pour une fois à l'écran

Que voilà un bien joli film allemand, « Une Valse dans les allées » que nous devons au réalisateur Thomas Stuber, tout juste 37 ans, qui nous parle des petites gens, certains ayant vécu en RDA avant de connaître l’Allemagne unifiée. Les dialogues sont pauvres, les échanges peu nombreux, les silences lourds de sens, et pourtant Stuber décrit avec minutie chacun des personnages avec une profondeur peu commune.

Il y a d’abord Christian, lequel a eu une adolescence difficile, au contact de voyous, prison au bout du tunnel, et qui veut repartir du bon pied dans la société en intégrant un entrepôt jouxtant un hypermarché, où son travail consiste à ranger dans des rayons des caisses de boissons, parfois à l’aide d’élévateurs qu’il va apprendre à manipuler.

Puis Bruno, ancien chauffeur routier en RDA, nostalgique de son ancien travail et de ses ex collègues, responsable du rayon boissons et qui va prendre sous son aile Christian, le former, lui apprendre à gérer le gerbeur. Une solide amitié va naître entre ces deux êtres que personne n’attend le soir à la maison.

Et puis Marion, jolie jeune femme au rayon confiserie, pas froid aux yeux, mais ayant besoin d’affection. Avec Christian, un semblant de profond sentiment apparaît, mais sans avenir comme la vie de tous ces êtres, car Marion est mariée à un homme friqué, et sans doute violent.

Et d’autres aussi, tel le chef d’atelier, âgé, proche de ses subalternes, lesquels forment une équipe soudée, buvant une bonne bière le soir, et fêtant Noël sous le porche de l’entrée, car il n’y a pour tous ceux-là, personne le soir pour les accueillir chez eux.

D’entrée, nous sommes dans l’entrepôt, les gerbeurs vont et viennent sans que l’on voie âme qui vive, sorte de valse à plusieurs temps. Le paysage extérieur, nu à perte de vue, seules quelques voitures passant au loin, renforce cette idée de déshumanisation de la société. Subsistent alors ces êtres qui n’ont pas tiré le gros lot dans ce monde de consommation et de fric, mais qui dégagent une vraie chaleur humaine.

Thomas Stuber a fait appel à deux acteurs que nous avons eu naguère tout le loisir d’apprécier, Franz Rogowski dans le rôle de Christian, il était Georg dans le magnifique « Transit » de Christian Petzold, et Sandra Hüller, Marion pleine de contradictions, en pleine recherche de tendresse, elle était Inès dans Toni Erdmann qui avait tant fait parler de lui.

Un film qui dégage une forte humanité, loin du clinquant habituel du cinéma, où la vraie vie des gens de peu est décrite avec une rare maîtrise.

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