mercredi 4 novembre 2015

Une allégorie du monde réel

The Lobster (le Homard *), du grec Yorgos Lanthimos, a reçu le prix du Jury au dernier festival de Cannes. Il est actuellement sur les écrans.

Dans une société quelque part en bord de mer, une ville et une forêt.
A la ville, il est interdit d’être seul. Si c’est le cas, on vous enferme dans un hôtel et vous avez 45 jours pour trouver l’âme sœur, à condition d’avoir un point commun, tels ceux qui boitent, ou qui saignent souvent du nez, ou qui sont totalement dépourvus du moindre sentiment. Sinon, vous êtes transformés en un animal de votre choix. A noter qu’on vit ici dans une époque moderne : les homosexuels sont acceptés. A quand la prochaine « manif pour tous » devant le Pathé Loire afin de dénoncer ce scandale ?
Au sein de la forêt, pour ceux qui y vivent, tout sentiment amoureux est proscrit : gare à ceux qui voudraient transgresser, la grande prêtresse (quelle froideur cruelle chez Léa Seydoux !) veille au grain et est capable de vous infliger les pires sévices.

Les deux « sociétés » entrent régulièrement en conflit, les uns munis de fusils à seringue hypothermique chassant le solitaire de la forêt, les autres pénétrant de nuit dans l’hôtel pour y régler leurs comptes.

Au milieu, ou en dehors, en fait totalement inconscient de ce qui se passe sous leurs yeux, la population vaque à ses habitudes, sans se soucier de ce qui se passe sous ses fenêtres.

Lanthimos a construit assurément une allégorie du monde actuel. Sont-ce les multinationales qui s’écharpent ? les partis politiques qui luttent pour avoir les places ? ceux prêts à trahir leurs amis pour les supplanter ? le fascisme à notre porte et que l’on refuse de voir entrer par la fenêtre ? Tout cela dans l’indifférence des peuples qui votent de moins en moins, lassés de ces « saigneurs », et sans projet porteur d’une société débarrassée de ces rats !

La musique oppressante et une voix Off venue d’outre-tombe donnent au film un caractère sépulcral, et néanmoins surréaliste, rappelant la célèbre série télévisée « le Prisonnier » de la fin des années 60. La fin sombre dans l’horreur, les deux amants s’enfonçant dans la nuit pour ne pas voir ce monde  en putréfaction.

Voilà un film à ne pas conseiller pour les âmes sensibles, mais à voir absolument !

* Colin Farrell, héros du film, avait choisi le homard au cas où il échouerait dans sa quête.

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