On avait quitté Jim Jarmusch avec « Only Lovers left alive », sorti en 2014, qui nous contait l’histoire de deux vampires immortels. Déjà, le réalisateur piochait dans la culture mondiale avec Marlowe, et nous montrait la planète en général, les USA en particulier, dans un état proche de la ruine.
Dans Paterson présenté en compétition officielle à Cannes cette année, le décor de change pas fondamentalement, avec ses immeubles abandonnés, ses quartiers déshérités, ou les fils électriques qui sillonnent le ciel (là-bas, on ne semble pas connaître l’enfouissement des réseaux électriques), le scénario est radicalement différent, car de scénario, il n’y en a point ou si peu !
Nous sommes donc à Paterson (New Jersey) où vécurent, Jarmusch nous le rappelle dans son film, les poètes William Carlos Williams et Allen Ginsberg. Car il sera beaucoup question de poésie ! Un couple (lui, c’est Paterson, même patronyme que la ville, elle, c’est Laura) s’aime d’amour tendre, juste des baisers, point de scènes de sexe, Jarmusch n’a pas besoin de cela pour attirer le spectateur, lui chauffeur de bus dans la ville, elle à la maison, un bouledogue anglais du nom de Malvin veille sur eux (en fait un chien savant).
Le film se subdivise en 7 parties, du lundi au dimanche. Chaque jour, lui va conduire son bus tout en créant des poèmes qu’il note sur un carnet, elle fait la cuisine, crée des cupcakes et peint en noir et blanc, un peu de tout, vêtements, murs, portes… La première scène du film, en contre plongée, est d’une grande beauté : le soleil s’infiltre dans la chambre à coucher, lui regarde sa montre, donne un baiser à sa femme qui déclare avoir fait un rêve, celui d’avoir des jumeaux, lui déclarant qu’ainsi, ils en auraient chacun un ! En fait, les jumeaux et les jumelles seront omniprésents, j’en compterai sauf erreur, 6 « paires » parmi les figurants ou seconds rôles.
Si la poésie semble le fil conducteur de film, la peinture apparaît, me semble-t-il, comme son complice, au travers d’une part le Noir et Blanc, dada de Laura qui semble ne connaître que ces deux couleurs, et surtout des portraits que peint Jarmusch, d’hommes et de femmes, rencontrés ça et là. Personnages très ordinaires dans la vie, mais qui dégagent chacun un plein d’émotion chez le spectateur, jusqu’au dernier, le Japonais rencontré au hasard sur un banc, dont le « ha ha » provoque l’enthousiasme. Un « ha ha », c’est rien, mais chez Jarmusch, ça peut être beaucoup ! Tiens : l’acteur japonais n’est autre que Masatoshi Nagase, vendeur de dorayakis dans « les Délices de Tokyo ».
Enfin, citons les deux acteurs qui forment ce magnifique couple, Adam Driver et la belle, la splendide Golshifteh Farahani, dont les cheveux noirs d’ébène sont poétisés par une jeune ado.
Jim Jarmusch nous offre un film lumineux, respirant à pleins poumons la culture tant américaine qu’européenne (on ne compte plus tous les clins d’œil), un film plein d’humour, de drôleries. Ce type-là est forcément un amoureux fou du cinéma, mais un cinéma qui pense !
oh ! t exagères quand tu parles d humour et droleries ...c est tellement discret !juste un peu comme toutes les actions dans ce film ....juste un peu ...si peu d ailleurs !
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